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Wikibardig:GEMAPI : Mesures de prévention des inondations : Augmenter ou conserver la capacité d’infiltration des sols

De Wikibardig

Sommaire


Lors d’une précipitation, tant que l’intensité de la pluie est inférieure à la capacité d’infiltration, l’eau comble les espaces du sol et imprègne par la suite les couches inférieures sous l'action de la force de gravité et des forces de succion. Lorsque l’équilibre précipitations /absorption est dépassé, il se crée une lame d’eau qui s’écoule à la surface du sol, c’est le ruissellement.

Dans les paragraphes suivants, nous présentons les techniques pour obtenir un sol avec une capacité d’infiltration améliorée. Elles consistent à utiliser des aménagements paysagers pour « désimperméabiliser » les sols et maximiser les capacités d’absorption du sol.

Cette prévention concerne alors différentes échelles, de la parcelle rurale (façon de labourer, augmentation de la couverture sol) ou urbaine (Modification de la couverture du sol) à une portion de bassin (zone expansion crue).

Contrôler le taux d’humidité dans le sol

➢ Irrigation de précision

Parcelle de betteraves avec croute de battance (© v.marmuse)

La capacité d'absorption (ou encore infiltrabilité) représente le flux d'eau que le sol est capable d'absorber à travers sa surface. Comme le montre sur le graphique ci-dessous la courbe potentielle de succion d’après (Philip, 1957), on peut grâce à l’irrigation de précision et la mesure de l’humidité dans le sol conserver la teneur en eau du sol. Grace à cette technique on peut maintenir une vitesse d’infiltration efficace lors d’évènements pluvieux. En plus de conserver l'état d'humidité du sol (teneur en eau minimale du sol), l’arrosage évitera la formation de la croute de battance (photo ci-dessous) qui entraîne elle aussi une baisse de l'infiltration de l'eau dans le sol et une augmentation du ruissellement. Il est à noter que cet état est cependant difficile à mesurer.

Modification de la structure du sol

Le type de sol du fait de sa structure, texture, porosité influence les forces de capillarité et d'adsorption dont résultent les forces de succion, qui elles-mêmes, régissent en partie l'infiltration. L’amélioration de la géologie du substratum pour rendre le sol plus absorbant et un travail approprié influent sur le ruissellement et la propagation des flux d’eau vers l’aval.

Le tableau ci-dessous, nous indique les valeurs du coefficient de ruissellement pour quelques sols et selon le type de couverture végétale et leur pente (%).

Augmenter-Conserver-Photo3.png
Coefficient de ruissellement en fonction du type de sol et de sa couverture (Bourrier, 1997)



Gel d’eau solidifiée mélangé à de la terre – (Source : eau-solide-terre source svt07.wordpress).

De nombreuses techniques existent pour améliorer les sols, deux techniques ont retenu notre attention :

a) Amender les sols :

  • Pour les sols lourds, un apport de matériaux tels que le sable ou la vermiculite, qui vont améliorer l'aération et le drainage du sol ;
  • Pour les sols légers, un apport de matière organique, de tourbe ou d'argile (marne) qui va permettre au sol d'améliorer sa capacité à conserver l'eau.

b) Épandre dans le sol du polymère super absorbant (eau solide) capable de retenir entre ses chaînes macromoléculaires de 300 à 1000 fois sa masse en eau.

Des solutions plus biologiques sont également à l'étude telle que des gels conçus à partir de carboxyméthylcellulose et d'amidon de pomme de terre.

Il faut éviter un travail excessif du sol qui provoque un émiettage trop fin et favorise la battance dans les sols limoneux.


Préservation ou intervention sur l’indice des vides des sols

Décompacter les sols

Décompacteur de sol 11 - 20 corps / avec rouleau (© ARAPLOW ACB).

Les sols sont également très vulnérables au compactage par l’excès de passage de machinerie d’entretien, d’engins agricoles, de vélos, de piétons, d’animaux d’élevage …. Il se forme alors un véritable cercle vicieux : plus le sol est compact, plus la vitesse d’infiltration est limitée, ce qui accroît encore davantage le taux de compactage et entraîne un accroissement du taux d’imperméabilisation du sol. Le sol peut alors être décompacté (fissuré) soit par labour, bêchage, décompacteur à lames. Le but est de créer un passage pour l'eau, l'air et la vie biologique

Augmenter l’indice des vides avec les « travailleurs de l’ombre »

Profil de sol avec vers de terre (© Christophe Salin (2015)).

En brassant le sol, les vers de terre et la vie microbienne aèrent et décompactent en douceur le sol. « Ces travailleurs de l’ombre » sont répartis sur tout le profil du sol et se déplacent le long de galeries de quelques millimètres de diamètre illustrées sur la photo suivante dans lesquelles l’eau, l’air et les organismes du sol circulent. Ces galeries créent des zones de ruissellement préférentielles qui permettent à l’eau de pluie de s’infiltrer au travers de ces réseaux de drainage naturel, évitant ainsi le ruissellement et l’érosion en surface. L’eau se diffuse profondément par capillarité à l’ensemble du sol.

Faciliter la rétention d’eau

Le drainage des sols

Opérations de drainage dans le vignoble à Saint-Vérand (Source : domaine Martine & Pierre-Marie CHERMETTE).

Les travaux de drainage permettent de réguler l’excès d’eau dans les sols tout en maintenant un niveau d’humidité nécessaire aux cultures. Le drainage vise à faire en sorte que l´eau soit immédiatement absorbée par le sol après une averse.

Les tranchées drainantes infiltrantes

Commune d’Arès : tranchée drainante comprenant géotextile périphérique, 20/40, drain annelé double peau perforé 3/3, diamètre intérieur 400 mm – (Source : eaupub).
Commune d’Arès : tranchée drainante comprenant géotextile périphérique, 20/40, drain annelé double peau perforé 3/3, diamètre intérieur 400 mm – (Source : eaupub).

Les tranchées drainantes infiltrantes sont remplies de matériaux poreux dans lesquels les eaux de pluie sont recueillies par ruissellement. Elles écrêtent les volumes et les débits. L’évacuation des eaux se fait dans le sol par infiltration.

Modification de la couverture du sol (revêtements perméables) – Augmentation de la couverture végétale des sols

➢ Modifier la couverture du sol en milieu urbain

L’urbanisation et le développement des voiries (routes, rues, places, parkings, trottoirs…) engendrent une forte imperméabilisation des sols. Les voies et aires de stationnement représentent 40 % des surfaces imperméabilisées en France. Avec un taux de ruissellement de surface très élevé, l’utilisation de revêtements perméables ou revêtements absorbants dans les espaces publics et chez les particuliers permet de limiter le ruissellement, et de contrôler les transferts de limons et de favoriser une absorption de l’eau directement dans le sol.

Aménagements et techniques agricoles

Modifier, préserver, rénover, créer les aménagements agricoles

La terre ne se cultive pas sans eau, l’eau ne se gère pas sans la terre. Conditionnée par le cycle naturel de l’eau (précipitations, évaporation, ruissellement, infiltration…), les liens entre l’eau, les sols et l’agriculture, sont indissociables. Depuis des siècles, les agriculteurs aménagent l’espace pour gérer au mieux les variances de la pluviométrie selon la saison tout en améliorant leurs conditions de production. Depuis le milieu des années 40, des changements structurels ont eu lieu ayant comme conséquence notable l’abandon et l’oubli de ces aménagements. Cette transition a engendré l’augmentation du ruissellement et donc des inondations aux points bas. C’est pour cela qu’aujourd’hui avec l’émergence de nombreux problèmes (épisodes méditerranéens) qu’annonce le réchauffement climatique, il semble nécessaire de préserver, rénover, d’adapter ces aménagements agricoles autrefois incontournables dans les territoires.

Les cultures en terrasses

Restanques - (source : tableaux-provence.com).

Les cultures en terrasses ralentissent voire interrompent les ruissellements. Les restanques permettent de stocker et d’infiltrer les eaux pluviales. Elles développent le coefficient de percolation souterraine, et la création de biotope plus favorable. In fine cette eau infiltrée rechargera la nappe. De plus, les terrasses confortent la couverture végétale et sa diversité, en raison d’un sol plus épais, plus humide que ceux des versants non aménagés. Ces aménagements ont une forte incidence sur le coefficient de ruissellement mais aussi permettent de prévenir les ravinements et alluvionnement et l’élargissement d’entonnoirs d’érosion

En zone péri-urbaine et agricole développer l’agroforesterie de type agrosylviculture

Mise en parallèle de deux orientations de production – (Source : © association française d'agroforesterie).

L'agrosylviculture est le nom donné aux pratiques incorporant des arbres aux cultures ou aux prairies à raison de 50 à 100 arbres / ha. Implantés généralement pour leurs effets protecteurs sur les cultures (brise-vent, diminution des impacts des pluies violentes, grêles et insolations excessives), ils permettent de réduire le ruissellement par la couverture du sol. Mais aussi, dès sa plantation celui-ci rentre en compétition avec la culture ce qui développe ses racines en profondeur et facilite la circulation capillaire de l'eau en « profondeur ».

Accroître la couverture végétale des sols

Les surfaces végétalisées participent au ralentissement de l’écoulement des eaux pluviales, favorisent l'infiltration de l'eau dans le sol, protègent le sol de l'impact des gouttes de pluie et des éclaboussures d'eau.

En zone urbaine

Montréal quartier de Rosemont-la Petite-Patrie, les jardins-trottoirs réalisés depuis 2014 (source Archives TC Media).

Les jardins partagés sont en plein essor, de nombreuses autres initiatives pour « jardiner la ville et le béton » se développent un peu partout, de nombreuses municipalités encouragent, la possibilité de végétaliser certains espaces du domaine public et notamment les trottoirs, ou le long des murs des habitations, sur 15 cm de large et 15 cm de profondeur. Il devient alors possible de fleurir la façade de sa maison, un pied d’arbre ou un espace « terre nue » …. De plus, les plantes en fixant certains polluants, améliorent la qualité des eaux d’infiltration et des rejets dans les cours d’eau et en mer.

Dans la couronne Périurbaine et dans les zones naturelles et forestieres

Travailleurs plantant des arbres sur le secteur du Riou Bourdoux Barcelonette (04) (Source, 1904 Séolane).
Résultat du reboisement réalisé par la RTM (Source, 2015 Di Maiolo).


Dans ces zones, les phénomènes géomorphologiques et climatiques ont été largement accentués par l’action anthropique, responsable d’un déboisement important et de la pression du surpâturage durant plusieurs siècles. Avec l’application de la loi du 18/06/1864 et la loi du 4 avril 1882, relative à la restauration et à la conservation des terrains en montagne, la forêt a pu reprendre ses droits bien aidée par les actions des services de la RTM (Restauration des Terrains en Montagne).

Le reboisement des bassins versants permet d’améliorer la régularisation du régime des eaux et de lutter contre l’érosion.

Labourer de façon perpendiculaire

Bande enherbée – (source : uved.univ-lemans.fr).

La façon de labourer un champ, en traçant des sillons perpendiculairement à la pente, permet de diminuer le ruissellement de type Hortonien . Le travail du sol à contre-pente et les techniques de labour suivant les courbes de niveau s'opposent à la concentration des eaux de ruissellement et limitent les déplacements de sol. Au contraire, des pratiques aratoires réalisées dans le sens de la pente favorisent le ruissellement et l'érosion hydrique en offrant des voies d'écoulement préférentiel aux eaux. Cette solution irait de pair avec l’implantation de noues avec bande enherbée au point bas, afin de faciliter la rétention des eaux et des polluants qui les accompagnent.

Référence

Di Maiolo P., Curt C., Curt T.,2018. Projet APOGEE - Analyse des POlitiques de GEstion du risque et de leur mise en oEuvre dans un cadre territorial et de développement durable - Tache 3.3 - Analyse des mesures de gestion du risque dans le cadre du développement durable - Inventaire des mesures « classiques » et alternatives de gestion du risque.


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