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ANSWER - Déformation d'une dune de sable dans un courant IRSTEA- essais physiques

De Wikibardig
Version du 9 décembre 2015 à 10:39 par Jeanmi Tanguy (discuter | contributions)

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Sommaire

Éléments de contexte

Afin d'étudier la déformation d'une dune de sable soumise à un courant, un essai a été réalisé dans le canal expérimental du hall hydraulique d'IRSTEA à Lyon. Ce canal inclinable est large de 1 m, long de 18 m et profond de 80 cm, avec une pente maximale de 5%,

Consistance de l'essai

L'objectif de la manip était de réaliser un essai qualitatif pour mettre en évidence les divers processus qui ont lieu lorsqu'une dune d'épaisseur importante par rapport à la profondeur d'eau était soumise à érosion par un courant.

Nous avons installé sur le bord aval droit du canal une dune triangulaire qui ne remplissait pas la totalité de la section (environ 30 cm par rapport à 1 m de large de la section du canal) afin de ne pas perturber un autre essai qui se déroulait plus en amont et sur les temps beaucoup plus long (plusieurs heures). L'essai concernant l'évolution de la dune ne devait pas dépasser 10 mn. Le sable utilisé a les caractéristiques suivantes : d50=813.21 microns; d10 = 555.65 microns; d90 = 1210.19 microns. Le débit liquide était de 60 l/s sur l'ensemble de la section.

Les dimensions initiales de la dune triangulaire étaient 8 cm de haut, 40 cm en base côté amont et 30 cm à l'aval (soit une base de 70 cm)

Aucune mesure de vitesse n'a été faite pendant l'essai. Les seuls enregistrements qui ont été réalisés furent le suivi de la déformation de la dune au travers de la paroi transparente du canal par une camera externe. Les images ont été exploitées de manière très grossière à partir de ces enregistrements vidéo.

Nous avons été assez étonnés de la cohérence des résultats obtenus, bien que le dispositif expérimental soit réduit et que la dune n'était pas répartie sur la totalité de la section, ce qui a induit des effets bidimensionnels qui ne peuvent pas être quantifiés.

L'objectif suivant sera de reprendre l'essai, avec des paramètres modifiés, mais avec une dune s'étendant sur l'ensemble de la section du canal.

Exploitation des films

Représentation des données collectées

La vidéos suivante illustre les principaux processus observés



IRSTEA évolution d'une dune - Haut débit par Wikhydro


L'exploitation des mesures faites à partir des films, a été réalisée sur SCILAB (voir fichier joint). Elle a permis de reproduire la dynamique de la déformation de la dune, de manière schématique, car aucune mesure de la topographie de la dune n'a pu être faite pendant l'essai.

Jeanmitanguy 1.gif

A partir de l'évolution du sommet de la dune et de la possibilité de mesurer sur la vitre du canal les dimensions de la dune au cours du temps, nous avons pu tracer les courbes suivantes : évolution de la vitesse de translation du sommet de la dune et évolution de volume de sable constituant la dune.

  • Évolution de la vitesse du sommet de la dune au cours du temps (figure 1)
  • Évolution du volume de la dune par unité de largeur au cours du temps (figure 2)
  • Évolution de la position du sommet de la dune au cours du temps (figure 3)
  • Évolution de la position du sommet de la dune au cours du temps - zoom (figure 4)
  • Évolution de la hauteur du sommet de digue au cours du temps (figure 5)
  • Évolution temporelle de quelques points caractéristiques (figure 6)
Figure 1
Figure 2
Figure 3
Figure 4
Figure 5
Figure 6

Exploitation des courbes vitesse et volume

L'analyse de la courbe des vitesses montre un processus en 3 étapes bien identifiées:

Étape 1 : t < 1mn

Arasement de la dune. Au début du processus, la lame d’eau est très faible au dessus du sommet de la digue et la vitesse très rapide. La vidéo montre que la surface de l’eau est très incurvée au dessus de cette zone. Le transport est de forte intensité et reste localisé au sommet. La face amont de la dune participe peu au transport solide. C’est la partie arasée qui alimente la partie aval : cette zone reste horizontale.

Remarquons que s’instaure dès le début de l’essai un processus d’éboulement sur la face aval. En effet, les particules qui proviennent de l’amont sont transportées à haute vitesse et sont éjectées du sommet de la dune pour ensuite se déposer sur la face aval. Cette zone d’éboulement reste très localisée sur quelques centimètres à l’aval de la digue, mais prend une pente constante (voisine de 23°) qui va subsister jusqu’à la fin de l’essai. Le sommet de la dune diminue en hauteur. Ce processus s’accompagne d’une diminution très rapide de la vitesse de translation horizontale du sommet de la dune qui passe de 0.37 cm/s à 0.15 cm/s (figure 1) en quelques secondes. Ceci provient du bilan de masse. En effet, le sommet de la digue descend rapidement à cause de l’érosion, ce qui induit une diminution du transport solide et donc une plus faible alimentation de la zone d’éboulement.

Étape 2: 1mn < t < 4 mn

La face amont de la dune commence à s’incliner et prend une valeur voisine de 0.02 (soit 7°) ce qui montre bien que le transport s’est installé sur l’ensemble de la face amont de la dune. A l’aval, la zone d’éboulement se translate et « descend la dune » avec une pente constante (23°).

Au fur et à mesure de l'évolution, le niveau du sommet de la dune diminue, ce qui est dû au transport solide de forte intensité.. Le bilan de masse explicité ci-dessus se poursuit donc, produisant une chute de la vitesse de translation horizontale qui passe de 0.15 cm/s à 0,05 cm/s (figure 1).

Étape 3 : t > 4mn

Peu avant 4 mn, la zone d’éboulement atteint le pied aval de la dune. Se met alors en place un régime permanent. La face amont est sujette à un transport solide qui reste conséquent et sa pente reste assez constante (7°). A l’aval, le processus est sensiblement différent de la période précédente. Le haut de la dune ne descend plus et se translate vers l’aval avec une altitude constante, voisine de 4 cm au-dessus du fond du canal. La vitesse de translation est constante, voisine de 0,067 cm/s (figure 1).

La figure 5 illustre la diminution du niveau de la dune au cours du temps. Globalement, la dune passe d'une hauteur de 8 cm à une hauteur de 4 cm et se stabilise en fin d'essai (10 mn) à cette valeur.

La figure 2 montre la conservation du volume de sable de la dune au cours du temps. Ceci est assez remarquable au regard de deux

  • les effets bidimensionnels transversaux qui pourraient résulter du fait que la dune n'occupent qu'une partie de la section du canal
  • l'alimentation amont en sédiment de la face aval de la dune qui n'a pas été quantifiée

Exploitation qualitative des données collectées

Nous avons recueilli un certain nombre de données lors de cette expérience :

  • le diamètre moyen des grains : $ d_{50} $ = 813 microns
  • débit liquide : $ Q=V/B.h $ =60 l/s sur l'ensemble de la largeur du canal qui est de $ B $ = 1 m
  • profondeur d'eau dans la période de propagation du front de sable dans sa dernière phase de propagation : $ h $ =10 cm

Nous allons nous concentrer ici sur cette phase de propagation uniquement, c'est-à-dire une fois que le pied de la zone d'éboulement ait rejoint le niveau bas du canal.

Nous allons supposer que le transport total de sédiment peut être quantifié à l'aide de la formule de transport d'Engelund-Hansen qui s'écrit: $ q_s=0.05*\sqrt{g\Delta d^{3}_{50}}\frac{V^2}{ghi}\theta $
avec:
$ \theta=\left(\frac{hi}{\Delta d_{50}}\right)^{5/2} $
L'équation qui régit la déformation des fonds par le processus de transport par charriage ou par transport total est explicité dans la page théorique ici.


$ h $ désigne ici la hauteur d'eau sous la surface, c'est-à-dire que l'axe des abscisses a été choisi en première approximation au niveau de la surface supposée donc fixe et horizontale. Tout ceci conduit à la relation: $ q_s=0.05\frac{1}{\sqrt{g}\Delta^2 d_{50}}\frac{Q^5}{B^5 K^{3}_{s}} h^{-11/2} $

Deux termes sont ici inconnus : $ q_s $ et $ K_s $

Or le transport solide qui concerne le haut de la digue peut être calculé par la pente de la droite caractéristique en rouge sur la figure 6 qui est de $ 7,2.10^{-4} $

Ce qui nous donne un coefficient de Strikler voisin de $ K_s = 25 m^{1/3}/s $

Recommandations pour une prochaine campagne d'expérimentation

Les remarques et recommandations suivantes permettront d'améliorer la compréhension des processus et de reproduire la dynamique sédimentaire à l'aide de mesures plus complètes:

  1. recommencer l'expérience avec une dune qui traverse toute la section transversale du canal pour éviter les effets bidimensionnels transversaux
  2. installer une caméra par zone de visibilité entre piliers (3 ou 4 caméras) qui permet de capter la surface libre et le profil de la surface du sable en continu
  3. mesurer à pas de temps variables (plus courts au début de l'expérience et progressivement plus longs) la distribution de la vitesse de l'eau tout au long du processus
  4. mesurer par une caméra positionnée au-dessus du canal la vitesse de progression des formes de fonds
  5. les conditions hydrauliques de cette expérience semblent convenir pour obtenir des formes de fonds peu prononcées. Elle pourraient être conservées
  6. mettre en œuvre différents profils de dune transversales (bilinéaire, sinusoïdale...)

Nota: Il sera nécessaire pour estimer l'influence des parois, lors des premières expériences, d'arrêter le modèle, de tirer une série de profils longitudinaux autour dans la zone d'influence de la dune et de les comparer aux profils mesures près des parois obtenus par les cameras. Ceci nous permettra d'estimer ainsi l'influence de ces dernières.


Le créateur de cet article est Jean-Michel Tanguy
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