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B.02 - Pluie : observations de précipitation ponctuelles au sol

De Wikibardig
Version du 24 janvier 2015 à 16:48 par Lionel Berthet (discuter | contributions)

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Contexte

Les postes pluviométriques au sol fournissent des observations ponctuelles des pluies. Nous en avons besoin pour connaître la lame d'eau précipitée sur le bassin par des méthodes d'interpolation (moyennes pondérées, méthode des polygones de Thiessen, krigeage, cf. fiche B.03). Météo-France exploite par ailleurs ces mesures pour la calibration des images de réflexivité des radars météorologiques et la production des lames d'eau Panthère et Antilope (fiche B.04).

Cette mesure est entachée d'une incertitude liée principalement à l'appareil de mesure (le pluviomètre) d'une part et à son environnement d'autre part. La précision des pluviomètres a fait l'objet de nombreux tests par divers organismes, tests réalisés en laboratoire ou in situ. Récemment, l'OMM a réalisé entre octobre 2007 et avril 2009 l'étude d'une trentaine de modèles différents sur le site de Vigna di Valle. Avant cela, la Direction des Systèmes d'Observation de Météo-France (DSO) avait publié en octobre 2000 une note sur l'estimation de l'erreur de mesure des précipitations. Les informations qui suivent sont, pour la plupart, extraites de ces publications.

Précision des appareils de mesure

Les pluviomètres sont des appareils qui permettent de mesurer les précipitations à pas de temps fin. Les procédés de mesure employés varient selon les modèles : appareils à augets basculeurs, appareil à pesée, mesure optique... Aujourd'hui, la plupart des appareils exploités dans les réseaux de Météo-France, des SPC et d'EDF sont des pluviomètres à auget basculeur, la différence entre les modèles portant, outre la marque et le modèle, sur la taille du cône récepteur (de 400 cm2 à 2 000 cm2) et la taille des augets. Le couplage entre la surface du cône de réception et la taille des augets détermine la résolution de l'appareil (au sens du pas de mesure des précipitations), en général 0,1 à 0,2 mm. Certains appareils sont de plus équipés d'un système de chauffage pour l'enregistrement des précipitations solides.

Les erreurs de mesure de l'appareil proprement dit peuvent être liées à l'intensité des précipitations, au vent ainsi qu'au mécanisme des augets proprement dit :

  • les erreurs de mouillage : une partie de l'eau reste collée sur le cône de réception et n'est donc pas mesurée par le mécanisme des augets. Cette erreur est estimée à moins de 0,1 mm ;
  • l'évaporation : l'eau qui reste au fond d'un auget peut s'évaporer en tout ou partie. Cette perte est limitée à la taille des augets, en général 0,2 mm ;
  • les erreurs liées à une forte intensité des précipitations . Deux erreurs sont possibles :

- un débordement du cône : ce risque est inexistant jusqu'à des intensités de plusieurs centaines de mm par heure si l'appareil est correctement entretenu (notamment si l'ajutage et le filtre situés en fond du cône de réception sont propres),

- une perte d'eau au moment du basculement des augets. Cette perte a été mesurée en laboratoire pour des intensités de pluie croissante : de l'ordre de 1 % pour des intensités inférieures à 20 mm/h jusqu'à 10 % pour une intensité de 200 mm/h ;

  • les erreurs liées au vent (erreur de captation) : elles sont réduites par le profilage du cône (les appareils cylindriques sont plus sensibles au vent) mais elles existent dans tous les cas. Elle est de l'ordre de 10 % en cas de pluie pour un vent de 10 m/s, 20 % pour un vent de 20m/s. Cette sous-captation devient très importante en cas de neige : elle est de l'ordre de 10 % pour un vent de 2m/s (quasi-nul) mais atteint 80 % pour un vent de 20 m/s. Des systèmes de brise-vent sont parfois employés dans des conditions extrêmes (Fig. 1) ;
  • les erreurs liées au mécanisme des augets sont faibles pour un appareil correctement entretenu. Une calibration régulière est nécessaire. Elle consiste à vérifier que le nombre de basculement d'auget pour un volume d'eau donné est correct (50 basculements à un ou deux près pour 1 litre d'eau pour des augets de 20 grammes). L'erreur de mesure liée au réglage des augets est estimée en moyenne à plus ou moins 5 %.


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Fig. 1. Pluviomètre de Ficher et Porter avec un écran protecteur pour limiter la force du vent (source : wikipédia)


D'autres erreurs peuvent être causées par des pannes de l'appareil ou de sa transmission : panne du contacteur provoquant l'incrémentation du compteur lors du basculement de l'auget (erreur supposée nulle en l'absence de panne), gel du mécanisme des augets (pour des appareils non chauffés), inclinaison de l'appareil (erreur inférieure à 3 % pour un appareil correctement réglé).

Imprécision liées à l'implantation des pluviomètres

Le choix du site d'implantation d'un pluviomètre est crucial pour garantir une bonne mesure des précipitations : un appareil situé à proximité d'un bâtiment sous-estimera les précipitations en fonction du sens du vent (au sol).

Ainsi, les critères d'implantation d'un pluviomètre font l'objet de recommandations de l'OMM, reprises par Météo-France dans une fiche technique de classification des sites de mesure. Ces recommandations portent principalement sur (figure ci-dessous) :

  • la hauteur d'installation du pluviomètre : elle est de 1 mètre au-dessus du terrain naturel ;
  • le choix du terrain : de préférence plat, et enherbé ;
  • l'absence d'obstacle à proximité du pluviomètre.

Dans la pratique, tous ces critères ne sont rarement réunis sur un même site. Une méthode de classification permet d'attribuer à chaque station une note allant de 1 (site excellent, fig. 2) à 5 (site médiocre, à éviter).


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Les appareils du réseau de nombreux SPC sont souvent, pour des raisons de coût d'infrastructure et de transmission, couplés avec d'autres capteurs (limnigraphes) et l'implantation de ces appareils répond rarement aux préconisations : appareil fixés en hauteur (sur la cabine de transmission), terrain non plat (les rivières coulent en général en fond de vallée), présence d'au moins un obstacle à proximité (poteau d'antenne radio, ou EDF, cabine de la station... ).

Exemple 1. Une classification (partielle) des appareils du réseau CRISTAL situés sur la Loire amont et l'Allier a montré que sur 14 postes pluviographiques en service, 2 relevaient de la classe 1 (absence d'obstacle à proximité immédiate du capteur), 4 étaient en classe 2, 7 en classe 3 et 1 en classe 4.

Les erreurs induites par l'implantation des pluviographes sur la qualité des mesures ne sont toutefois pas parfaitement connues, certains appareils mal implantés donnant des cumuls de précipitation assez comparables à ceux de postes Météo-France situés à proximité.

Exemple 2. Les cumuls pluviométriques observés par les pluviomètres du SPC LCI ont été comparés aux observations des postes de Météo-France voisins :

  • à Vierzon, le poste CRISTAL, situé sur le toit de la cabine, entre deux bâtiments, a enregistré un cumul de 684 mm sur l'année 2010 alors que, pour la même période, le poste Météo-France enregistrait 732 mm (déficit : 6,5 %) ;
  • à St Amand-Montrond, le poste CRISTAL installé sur la cabine du limnigraphe a enregistré un total de 700 mm sur l 'année 2010 contre 742 mm sur le poste Météo-France (déficit : 5,7 %) ;
  • à Andrézieux-Bouthéon, le poste CRISTAL mal implanté a enregistré 744 mm en 2010 contre 861 mm au poste Météo-France (déficit : 13,5 %).

Les chiffres globaux cumulant toutes les sources d'erreurs précités suivants sont avancés par Météo-France (note technique DSO n°42)  :


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Au final, les principales erreurs de mesure des pluviomètres, en l'absence de panne, sont causées par la sous-captation des précipitations lié à l'effet du vent. Cette sous captation est plus importante lorsque le site d'implantation du capteur ne répond pas aux préconisations définies par l'OMM. L'effet de sous-captation en cas de précipitations solide est notable : il dépasse 50 % en cas de vent supérieur à 5 m/s.


Voir également

Fiche B.03 – Calcul d’une pluie de bassin par interpolation de mesures ponctuelles

Fiche B.04 – Estimation d’une pluie de bassin par observation RADAR


Pour aller plus loin

Michel LEROY (DSO/DOS) (2000) Estimation de l'incertitude de mesure des précipitations, Météo-France/DSO Note numéro 42 (disponible sur http://extranet.schapi.i2/spip/spip.php?article937)

Michel LEROY (Météo-France/DSO) (2009) Classification d'un site Note technique numéro 35

World Meteorological Organization,Instruments and observing methods, report N°99 (2009), WMO field intercomparison of rainfall intensity gauges, Vigna di Valle, Italy, october 2007-avril 2009

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