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Barré de Saint Venant (équations de) (HU)

De Wikibardig

Traduction anglaise : Barré de Saint-Venant's equations

Dernière mise à jour : 11/08/2022

Les équations de Barré de Saint Venant décrivent les écoulements à surface libre non permanents, unidimensionnels ou bidimensionnels.

Leur résolution permet de définir, selon les coordonnées de l'écoulement, les variations temporelles du niveau d’eau (voir ligne d'eau) de la vitesse et du débit dans les sections retenues pour le calcul.

Sommaire

Éléments d'historique

L'étude mathématique des écoulements à surface libre en régime transitoire n'est pas une discipline scientifique nouvelle. Elle a débuté, il y a déjà près de 250 ans, lors de l'essor de l'ensemble des théories mécaniques, avec les travaux de Laplace (1776) et de Lagrange (1781) sur la propagation d'ondes à la surface de canaux. Dès 1871, Barré de Saint Venant réussit à représenter mathématiquement le mouvement unidimensionnel des eaux à surface libre par un système d'équations aux dérivées partielles. Depuis lors, ces équations servent de base aux modèles mathématiques d'écoulement à surface libre. Les modèles mathématiques issus des équations de Barré de Saint Venant font partie de la famille des modèles mécanistes.

En raison de la grande quantité de calculs qu'elle nécessite, la résolution numérique des équations complètes de Saint-Venant n'est possible que depuis l'invention des ordinateurs, c'est à dire la deuxième moitié du 20ème siècle.

Écriture des équations de Barré de Saint venant

Hypothèses générales

Ces équations ont tout d'abord été établies pour des écoulements unidimensionnels. Ceci suppose donc :

  • que l'écoulement se fasse le long d'une direction privilégiée $ x $ ;
  • que les caractéristiques de ces écoulements (en particulier leur vitesse) puissent être considérées comme correctement approchées par leurs valeurs moyennes dans une section droite orthogonale à $ x $.

Les variables sont le débit $ Q(x,t) $ et la section mouillée $ S(x,t) $, ou la vitesse $ V(x,t) $ et le tirant d'eau $ h(x,t) $, ou encore la cote $ z(x,t) $ de la surface libre, toutes fonctions des seuls paramètres abscisse x, temps t. Pour simplifier l'écriture ces variables seront simplement notées $ Q{,} S{,} V{,} h{,} z $.

La vitesse considérée ici est donc une vitesse moyenne débitante, telle que l'on puisse écrire : $ Q = V.S $, et la hauteur transversale est supposée constante sur la largeur de la surface libre. Il n'est donc pas possible de tenir compte de surélévation intrados-extrados dans les coudes, ce qui exclut, en toute rigueur, de simuler les écoulements dans des tronçons présentant des courbures importantes.

Une hypothèse importante sous-jacente à l'unidimensionnalité réside dans la répartition hydrostatique des pressions, hypothèse qui permet d'écrire la résultante des forces de pression sous la forme :


$ g.\frac{\partial h}{\partial x}.dx \quad(1) $

Ceci suppose qu'il n'y a pas de composante verticale de la vitesse et donc qu'il n'y a pas de surélévation brutale de la ligne d'eau ou des fonds.

Remarque : malgré ces limites théoriques, il arrive cependant souvent que ces équations soient utilisées en dehors de leur champ normal d'application, par exemple pour traiter de la propagation d'ondes associées à des manœuvres brusques, telles que des lâchures de barrage, des ouvertures rapides de vannes, etc.

Les équations de Barré de Saint Venant sont formées d'un couple de deux équations aux dérivées partielles en $ x $ et $ t $, traduisant :

  • la conservation de la masse ;
  • la loi fondamentale de la dynamique.

Pour les réseaux d'assainissement, les couples de variables les plus couramment utilisées pour écrire ces équations sont $ (Q, h) $ ou $ (V, h) $. Dans le cas des milieux naturels où les pentes sont difficiles à définir on utilise plutôt $ (Q, z) $ ou $ (V, z) $.

Conservation de la masse

L'équation dite de continuité traduit la conservation de la masse et s'écrit :


$ \frac{\partial S}{\partial t}+\frac{\partial Q}{\partial x}=q \quad(2) $

$ q $ représente un éventuel débit latéral, par unité de longueur, positif ou négatif selon qu'il s'agit respectivement d'un débit d'apport ou de fuite.

En notant $ B(h) $ la largeur de la surface libre, on peut écrire :


$ \frac{\partial S}{\partial t}= B(h).\frac{\partial h}{\partial t} \quad(3) $

L'équation (2) devient alors, avec le couple de variables ($ Q, h $) :


$ B(h).\frac{\partial h}{\partial t}+\frac{\partial Q}{\partial x}=q \quad(2) $

La même équation peut également s'écrire avec le couple de variables ($ V,h $) en utilisant la relation : $ Q = V.S $.

Conservation de la quantité de mouvement

La seconde équation aux dérivées partielles est l'équation dynamique qui traduit la conservation de la quantité de mouvement, ou encore la loi fondamentale de la mécanique.

L'une des formulations les plus classiques est la suivante :


$ \frac{\partial Q}{\partial t}+\frac{\partial (Q^2/S)}{\partial x}+g.S.\frac{\partial h}{\partial x}=g.S.(I-J)+k.q.\frac{Q}{S} \quad(5) $

Avec :

  • $ I $ : pente du canal (m/m) ;
  • $ J $ : pente de la ligne d'énergie ou pertes de charge par unité de longueur (m/m) ;
  • $ k $ : coefficient compris entre -1 et +1 ; avec
  • $ k $ positif si le débit latéral est entrant (apport de quantité de mouvement) et négatif s'il est sortant (export de quantité de mouvement) ;
  • $ k $ proche de 0 si le débit d'apport (ou de fuite) est approximativement orthogonal à $ x $, de façon à ne pas apporter (ou emporter) en même temps une quantité de mouvement, tandis $ k=1 $ suppose que le débit d'apport (ou de fuite) apporte (emporte) avec lui sa quantité de mouvement avec une vitesse égale à celle de l'écoulement principal.

Nota : En pratique, dans les réseaux d'assainissement, on néglige généralement la quantité de mouvement apportée ou emportée par les apports ou les fuites latérales de débit.

L'emploi de la pente $ I $ dans l'expression des forces de pesanteur sous-entend des pentes faibles. Enfin, le fluide est supposé incompressible.

Avec ces différentes hypothèses et en divisant par S pour faire intervenir la vitesse moyenne de l'écoulement, l'équation (5) peut finalement se mettre sous la forme classique :


$ \frac{\partial V}{\partial t}+V.\frac{\partial V}{\partial x}+g.\frac{\partial h}{\partial x}=g.(I-J) \quad(6) $


Écriture compacte

Il est également possible d'utiliser une écriture vectorielle compacte des équations. En posant :


$ U = \binom{S}{V} \quad(7) $ qui représente le vecteur des variables conservatives ;


$ F(U) = \binom{Q}{\frac{V^2}{2} + g.h}\quad(8) $ qui représente les flux ;


$ S(U) = \binom{q}{g.(I-J)} \quad(9) $ qui représente les termes sources ;


on peut alors écrire :


$ \frac{\partial U}{\partial t}+\frac{\partial F(U)}{\partial x}=S(U) \quad(10) $


Nota : Il existe encore d'autres formes pour ce système d'équations ; en particulier, pour représenter les écoulements naturels, on préfère généralement travailler en cote $ z $ de la surface libre ; les équations sont identiques à la condition de remplacer $ h $ par $ z $ et de prendre $ I = 0 $.

Estimation des pertes de charge

Il est nécessaire de faire l'hypothèse que les pertes de charges pour les écoulements non permanents peuvent s'exprimer de la même façon que pour les écoulements permanents graduellement variés (Voir Pertes de charge), c'est à dire d'écrire $ J $ sous la forme :


$ J=\frac{λ.V^2}{2.g.D_h}\quad(11) $

  Avec :

  • $ λ $ : coefficient de pertes de charge (sans dimension) ;
  • $ D_h $ : diamètre hydraulique de la conduite ($ D_h = 4.R_h $) (m) ;
  • $ R_h $ : rayon hydraulique de la conduite (m).

Le coefficient de pertes de charge est fonction de la rugosité des parois, de la viscosité du fluide, du diamètre hydraulique de la conduite, mais également des « macro-aspérités » du réseau (branchements, câbles, échelles, arrivées latérales de débit, etc.). Il existe de nombreuses formules pour le calculer.

Les plus utilisées sont celles de Manning-Strickler, de Colebrook et dans une moindre mesure de Bazin.

Fermeture des équations

Les équations de Barré de Saint Venant sont valables sur un bief régulier et pour un temps courant. Pour les résoudre, il est nécessaire de "fermer" le système d'équations en rajoutant des conditions aux limites à chacune des extrémités du bief. Une condition initiale cohérente précisant la valeur des grandeurs choisies au début du calcul est également indispensable.

Un bief peut être limité par un grand nombre d'ouvrages ou de singularité : extrémité amont, chute, seuil, jonction ou défluence, ouvrage spécial (station de pompage, bassin de retenue, déversoir d'orage, etc.) ou exutoire, qui peut lui-même être de différents types.

Chacun de ces ouvrages ou particularités doit être représenté par des équations compatibles avec les équations de Barré de saint-Venant. On trouvera aux articles traitant de ces différents éléments des pistes pour écrire ces équations. Voir aussi le § sur la modélisation des singularités.

Résolution des équations de Barré de saint Venant

Plusieurs méthodes peuvent être envisagées pour résoudre les équations de Barré de Saint-Venant. Les plus classiques utilisent des schémas de différences finies. Des schémas mixtes combinant différences finies, éléments ou volumes finis, sont également possibles. La résolution est le plus souvent directe, mais peut également faire appel à la théorie des caractéristiques qui permet de remplacer le système d'équations aux dérivées partielles par une équation différentielle. Les équations peuvent éventuellement être simplifiées avant leur résolution.

Simplifications possibles

La résolution directe des équations complètes de Barré de Saint Venant n'est possible que depuis l'apparition, à la fin des années 1960, d'ordinateurs suffisamment puissants pour permettre le développement des logiciels de résolution. C'est pourquoi, avant cette période, on a cherché à le simplifier. Les approches de ce type présentent d'ailleurs toujours de l'intérêt pour les logiciels techniques car elles permettent de construire des schémas plus robustes et plus rapides, tout en fournissant des réponses suffisamment précises pour certains cas d'application. Les simplifications utilisées reposent sur les considérations suivantes :

  • les ordres de grandeur relatifs des différents termes des équations de Barre de Saint-Venant dépendent des caractéristiques géométriques et des conditions aux limites ;
  • l'équation de continuité ne contient que deux termes ; en régime non-permanent, aucune des deux dérivées partielles du premier membre ne peut être nulle ou négligeable ; cette équation ne peut donc pas être simplifiée ;
  • l'équation de conservation de la quantité de mouvement (équation dynamique) contient cinq (ou six s'il y a débit d'apport) termes et un assez grand nombre de simplifications sont possibles. En effet, il est rare que les cinq termes de cette équation soient tous du même ordre de grandeur.

Par exemple, la signification des termes dans l'équation (6) est la suivante :


$ \frac{\partial V}{\partial t}+V.\frac{\partial V}{\partial x}+g.\frac{\partial h}{\partial x}=g.(I-J)\qquad(6) $
  • le terme d'inertie $ \displaystyle\frac{\partial V}{\partial t} $ dépend essentiellement du temps, donc de la vitesse de montée de la crue ;
  • le terme d'accélération convective $ V.\displaystyle\frac{\partial V}{\partial x} $ dépend plutôt de la géométrie des canalisations ;
  • le terme $ \displaystyle{g.\frac{\partial h}{\partial x}} $ dépend de la pente de la ligne d'eau ;
  • le terme $ g.(I-J) $ dépend de la pente et des frottements.

La simplification la plus courante consiste à considérer les termes d'inertie et d'accélération convective comme négligeables. On obtient alors le modèle de l'onde de crue diffusante :


$ g.\frac{\partial h}{\partial x}=g.(I-J)\qquad(6) $

Même s'ils donnent des résultats souvent acceptables dans de nombreux cas, ces modèles simplifiés ont perdu beaucoup d'intérêt avec le développement de logiciels commerciaux performants capables de résoudre rapidement les équations complètes même sur des réseaux complexes.

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