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Eau claire parasite (HU)

De Wikibardig

Traduction anglaise : Infiltration and inflow - I/I

Dernière mise à jour : 17/10/2022

Eau claire présente en permanence ou par intermittence dans les systèmes d'assainissement alors qu'elle ne devrait pas s'y trouver ; on utilise souvent le diminutif ECP.

Sommaire

Origine des eaux claires parasites

Ces eaux sont d'origine naturelle (captage de sources, drainage de nappes, fossés, inondations de réseaux ou de postes de refoulement, etc.) ou artificielle (fontaines, drainage de bâtiments, eaux de refroidissement, rejet de pompe à chaleur, de climatisation, etc.).

Cas des réseaux unitaires et eaux pluviales

Dans les réseaux unitaires, on distingue généralement trois types d'ECP :

  • Les ECP permanentes ou saisonnières : elles peuvent être dues à des captages de sources, à des drainages permanents de nappes, à des fuites d'eau potable, etc. Leur principale caractéristique est qu'elles sont sensiblement constantes au cours du temps (elles peuvent cependant présenter des fluctuations saisonnières).
  • les ECP événementielles : elles sont directement liées aux événements pluvieux et correspondent le plus souvent à des infiltrations d'eau de surface qui se sont accumulées dans les tranchées autour des conduites. Elles se prolongent généralement quelques jours après les précipitations importantes avec une décroissance régulière. On parle souvent du phénomène de « ressuyage ».
  • les ECP accidentelles : elles sont dues à des événements spécifiques plus ou moins prévisibles : crues de rivières, pompage de nappe pour des travaux, vidange de piscine, etc. Elles se manifestent de façon plus ou moins aléatoire et sont très difficilement prévisibles.

Ces eaux viennent se rajouter aux eaux pluviales et, dans le cas des réseaux unitaires, aux eaux usées (figure 1).


Figure 1 : Différents composantes d'un hydrogramme dans un réseau unitaire.

Cas des réseaux séparatif eaux usées

Dans le cas des réseaux eaux usées stricts on divise souvent les ECP événementielles entre :

  • les ECP de captage (EPC) qui peuvent par exemple correspondre à un ruissellement direct et qui arrivent rapidement dans le réseau après une période pluvieuse, généralement du fait de mauvais branchements ; ces effluents n'ont cependant pas toujours été considérés comme des eaux parasites, car des branchements d’eaux pluviales au réseau d’eaux usées ont parfois été réalisés volontairement, en particulier pour favoriser l'autocurage ; c'est encore le cas dans certains réseaux dits pseudo-séparatifs,
  • les ECP d'infiltration (EPI) qui correspondent au drainage des sols et qui arrivent de façon retardée (Breil et al., 1993).

Conséquences des ECP sur le fonctionnement des réseaux et des stations d'épuration

Les ECP augmentent les débits et diluent les eaux usées. Elles pénalisent donc fortement le fonctionnement des stations d'épuration. Par ailleurs elles augmentent les dépenses énergétiques dès lors que les systèmes d'assainissement sont munis de stations de pompage. Dans certains cas elles peuvent même contribuer à augmenter la durée et le volume des rejets par les déversoirs d'orage.

Les eaux parasites d'infiltration peuvent également contribuer à déstabiliser les conduites en entrainant les matériaux sur lesquels elles sont posées.

Modélisation des eaux claires parasites

Du fait du caractère involontaire et imprévisible des eaux claires parasites, leur modélisation est obligatoirement fondée sur des mesures permettant de caler les modèles. On distingue généralement :

  • une composante d'ECP permanente, que l'on peut représenter par exemple par des valeurs moyennes mensuelles pour tenir compte des variations saisonnières ;
  • une composante d'ECP événementielle, que l'on peut représenter par deux paramètres :
    • une valeur de débit pendant la durée de la pluie, fonction de la hauteur antécédente de pluie précipitée ; la relation entre la valeur de débit et la hauteur antécédente de précipitation peut être linéaire ou plus généralement de type exponentiel croissante ; le débit d'ECP est ainsi maximum à la fin de la pluie ;
    • un coefficient de décroissance en fonction du temps à partir de la fin de la pluie, généralement choisi pour que le débit d'ECP dure entre 1 et 5 jours après la pluie selon l'importance de la précipitation ; la décroissance peut être linéaire ou présenter une forme asymptotique (exponentielle ou hyperbolique).

Les ECP accidentelles sont par nature totalement imprévisibles et ne peuvent pas être modélisées de façon prévisionnelle.

Estimation des débits d'eaux claires parasites

Le calage des modèles précédents (ou l'estimation directe des quantités d'ECP) nécessite d'être capable de reconnaître la part d'eaux claires parasites dans le débit qui s'écoule à un moment donné dans le réseau d'assainissement.

Cas des périodes de temps sec

Diversité des méthodes

Pendant les périodes de temps sec (lorsque le débit d'eau pluvial a fini de s'évacuer) circulent uniquement des eaux usées et des eaux parasites. Il est alors possible de distinguer ces deux types d'eau. Reprenant en partie les travaux de Belhadj (1994), De Bénédittis (2004) a par exemple recensé 15 méthodes différentes permettant cette distinction. Ces méthodes reposent sur deux principes généraux :

  • Principe (1) : Pendant ces périodes, le débit d'ECP correspond à la différence entre le débit total de temps sec et le débit d’eaux usées strictes. Le débit d'eau usée strict peut lui même être apprécié par deux familles de méthodes :
    • méthodes débitmétriques : le débit d'eau usée strict est calculé en fonction de la consommation journalière en eau potable et/ou du nombre d’habitants ;
    • méthodes chimiques : le débit d'eau usée strict est calculé en fonction des débits massiques de polluants caractéristiques des eaux usées domestiques (DBO, DCO, MES, Azote total Kjeldahl, etc.) (avec l'hypothèse que la concentration des eaux claires parasites est nulle pour chacun de ces indicateurs).
  • Principe (2) : Le débit d’eaux usées strictes est faible en période nocturne, le débit d’ECP est donc proche du débit nocturne minimum. Pour les réseaux étendus (et/ou de pente faible), certaines méthodes utilisent un coefficient de correction pour tenir compte d’un débit résiduel nocturne d’eaux usées strictes.

Certaines de ces 15 méthodes peuvent utiliser simultanément ces deux principes généraux, ce sont des méthodes dites « hybrides ».

Préconisations

Parmi toutes ces méthodes, la plus simple et la plus pertinente nous semble être la méthode du rapport nycthéméral qui est rapidement présentée ci-dessous (Savary, non daté).

Le rapport nycthéméral $ n $ est défini par la relation :


$ n = Q_n / Q_j qquad (1) $

avec :

  • $ Q_n $ : Débit moyen nocturne par temps sec ;
  • $ Q_j $ : Débit moyen diurne par temps sec.

Le débit moyen nocturne est généralement établi sur une période de durée $ dn $ comprise entre 6 et 8 heures. Le débit moyen diurne l’est alors sur une période de 18 à 16h. Pour des réseaux longs et plats, une durée de 6 heures est mieux adaptée.

On peut relier la valeur du rapport nycthéméral à la proportion d’eaux parasites véhiculées par le réseau grâce à la formulation suivante :


$ \Frac{V_p}{V_j} = \frac{24.(n - n_0)} {(24 - d_n + n.d_n).(1 - n_0)} qquad (2) $

avec :

  • $ V_p $ : Volume journalier d’eaux parasites véhiculé par temps sec,
  • $ V_j $ : Volume journalier d’effluents par temps sec,
  • $ n $ : Rapport nycthéméral,
  • $ n_0 $ : Rapport nycthéméral représentatif d’un réseau sain (exempt d’eaux parasites),
  • $ d_n $ : Durée de la période nocturne (en heures).


Les rapports nycthéméraux considérés comme représentatifs d’un réseau sain, se situent, par expérience, aux alentours de :

  • 0,12 à 0,15 pour $ d_n $ = 6 heures,
  • 0,20 à 0,25 pour $ d_n $ = 8 heures.

En cas de doute ou d'études à enjeux, il est fortement conseillé de mettre en œuvre différentes méthodes ce qui permet d'une part d'affiner le résultat et d'autre part d'estimer la marge d'incertitude.

Cas des périodes pluvieuses

Le débit d'ECP événementiel doit également être évalué pendant les périodes de pluie, ou juste après les périodes de pluie.

Il est relativement simple de déduire du débit total la part des ECP saisonnières du fait de leur évolution lente dans le temps. Il est également assez facile de déduire le débit de temps sec dont les fluctuations sont relativement identiques d'une journée à l'autre (avec toutefois des variations entre jours ouvrés et jours non ouvrés et de congés). La différentiation entre les eaux pluviales issues d'un apport direct au réseau et les eaux parasites événementielles est beaucoup plus difficile car la nature physico-chimique de ces deux types d'eaux est relativement proche (même si les eaux parasites d'infiltration sont moins chargées en polluants et en particulier en MES).

De ce fait la distinction est souvent faite de façon arbitraire en considérant que les ECP événementielles sont égales au débit total moins la somme des débits des trois autres types d'eau (Eaux usées, Eaux pluviales et ECP permanente), le débit d'eau pluvial étant estimé à partir d'une modélisation mathématique.

L'utilisation de méthodes d'assimilation des données pour caler simultanément les paramètres du modèle de représentation des eaux pluviales d'une part, et du modèle de représentation des ECP événementielles d'autre part, permet d'améliorer sensiblement les résultats.

Recherche et élimination des sources d'ECP

Du fait des problèmes posés par le ECP, on cherche souvent à les limiter de façon à améliorer le fonctionnement du système d'assainissement. Pour ceci il est nécessaire de savoir de quelle façon et à quel endroit ces eaux sont introduites dans le réseau. Les méthodologies suivies pour atteindre ce but utilisent le plus souvent le travail fondateur de Ranchet et al.(1982). Elles se décomposent en trois phases successives :

  • diagnostic global du système d’assainissement dans les zones où les eaux parasites sont observées : visites de terrain, choix des sites de mesure et mise en place d'une campagne de mesures si possible longue pour bien prendre en compte les variations saisonnières et événementielles.
  • Analyse des chroniques pluie-débit fournies par les mesures au pas de temps horaire ou journalier (et des mesures de polluants si disponibles) : quantification des apports et répartition par secteurs géographiques et par type d’eaux parasites ; localisation des zones prioritaires a priori les plus défectueuses.
  • Analyse détaillée des zones prioritaires par l’emploi de techniques spécifiques :
    • tests à la fumée pour localiser les branchements non conformes d’eaux pluviales sur les réseaux séparatifs eaux usées (analyse amont->aval et aval->amont);
    • traçage (en général au colorant) pour localiser les branchements erronés (analyse uniquement amont->aval) ;
    • inspections télévisées pour localiser des défauts structurels.

Ces trois phases d’investigation sont suivies par une phase d’étude et de comparaison des différentes solutions permettant de réduire l’impact des eaux claires parasites sur les réseaux d’assainissement afin d’élaborer un programme d’aménagement.

Bibliographie :

  • Belhadj, N. (1994) : Variations par temps de pluie des débits dans les réseaux d’eaux usées de type séparatif: identification des composantes et modélisation des infiltrations ; thèse ENPC; téléchargeable sur : https://pastel.archives-ouvertes.fr/file/index/docid/529364/filename/1994TH_BELHADJ_N_NS17981.pdf
  • Breil, P. , Joannis, C., Raimbault, G. (1993) : Drainage des eaux claires parasites par les réseaux sanitaires. De l'observation à l'élaboration d'un modèle prototype ; LA HOUILLE BLANCHE ; N'1, 1993 ; pp 45-57 ; téléchargeable sur : https://www.shf-lhb.org/articles/lhb/pdf/1993/01/lhb1993005.pdf
  • Ranchet, J., Renard,D., Vicy, A. (1982) : Analyse et détection des eaux parasites dans les réseaux d'assainissement ; TSM ; vol.77, n°4,avril 1982, pp.731-183.
  • Savary, P. (non daté) : Cours d'assainissement (extrait) ; document fourni sur demande.


Pour en savoir plus :

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