S'abonner à un flux RSS
 

Effet de claque généré par une vague sur une paroi verticale

De Wikibardig
Version du 1 mars 2013 à 09:57 par Jeanmi Tanguy (discuter | contributions)

(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)

Sommaire

Préambule

C’est en lisant le programme initial des journées jst-2012 et plus spécialement le titre de la communication de Dominique ASTRUC, qu’il m’a semblé important de préciser mes idées sur le sujet. Merci donc Dominique ASTRUC de m’avoir donné l’opportunité d’apporter une contribution à ce phénomène de claque des vagues. En effet, pour diverses raisons, les travaux que j’avais entrepris sur cette thématique n’ont pu être achevés, et donc n’étaient pas, a priori, publiables.


Introduction

Les premières études sur le sujet ont été entreprises à l’Institut Franzius de Hanovre par les Professeurs Hans Werner PARTENSKY et Hocine OUMERACI (Professeur à l’Université de Braunschweig) et publiées dès 1992.
Dans le cadre de nos échanges scientifiques nous avons abordé un grand nombre de domaines, dont celui des efforts exercés par la houle sur les digues verticales (programme Européen PROVERBS de MAST III).
Concernant le sujet de l’effet de claque d’une vague déferlante sur une paroi verticale, bien que conscient du phénomène j’avais du mal à partager l’idée que c’était la bulle d’air emmagasinée lors du déferlement (plongeant) qui était l’élément principal. Sans, à priori, remettre en cause son existence. Et pour moi, le « run-up » généré lors de l’impact n’était pas un élément suffisant pour quantifier avec précision l’intensité de l’effort et pouvoir prolonger cette théorie à des structures non planes.

A cette époque, je ne disposais pas des outils adaptés à une étude aussi spécifique, mais ayant construit un canal à houle à paroi vitrées pour accéder, par Vélocimétrie laser, à l’étude du champ des vitesses et de la turbulence générés par la houle (1982/1983), mes observations ne me conduisaient pas à valider l’hypothèse de la bulle d’air.

Ce n’est que par la suite, lorsque j’ai pu m’équiper d’un deuxième canal à houle, avec un générateur de houle spécifique permettant de programmer des vagues déferlantes à une distance bien précise dans le canal que j’ai pu valider mon hypothèse.

L’impact d’une vague déferlante sur une paroi est dû au fait que la masse de la vague déferlante est brutalement stoppée. Imaginez un train percutant un mur !

Le problème est donc dû à la variation de quantité de mouvement de l’ensemble (ou d’une partie) de la vague.

Dispositif expérimental

Le canal à houle

Les études ont été réalisées dans le canal que nous avons conçu et mis au point en 1998 en collaboration avec le bureau d’études écossais Edinburgh Designs Ltd.
Ce canal de 22 m de long et 0.80 m de large, a des parois vitrées pour les mesures par vélocimétrie laser. Et le fond est en partie vitré pour permettre les études par vélocimétrie par images de particules (PIV). Le batteur est un batteur piston, commandé par micro-ordinateur et servomoteur. Il est lui aussi le fruit de la coopération avec ce même bureau d’études, il permet la génération d’ondes complexes : houles aléatoires à partir de divers spectres classiques (Pierson-Moskowitz, Jonswap, Bretschneider, etc…) ou personnalisés (en fonction d’études in situ), déferlement et/ou impact par train d’ondes …

Les mesures ont été réalisées par vélocimétrie laser (DANTEC). J’avais, dès 1981, adapté ce système de mesure, connu à l’époque uniquement par les aérodynamiciens, aux mesures de la turbulence dans la houle (première mondiale). Cette technique adaptée à la houle a été très bien détaillée dans les thèses des Doctorants dont j’ai assuré la direction et les publications associées.

La maquette

A cette époque, nous effectuions des études concernant la mesure des pressions générées par la houle sur les parois verticales d’un caisson JARLAN. Ces études s’incéraient dans le cadre du Programme Européen PROVERBS de MAST III (MAS3-CT95-0041, 1996-1999), PRObabilistic design tools for VERtical BreakwaterS.

Nous avons utilisé la maquette réalisée pour cette étude en modélisation physique (1:25ème) dans le canal à houle du laboratoire. Et nous n’avons pas modifié le dispositif expérimental des essais qui étaient menés pour différentes formes et dimensions de bermes rocheuses. Les parois verticales du caisson JARLAN étaient munies de capteurs de pression.

Analyse des résultats

Les mesures ont été réalisées en 2002 dans le cadre du stage de DEA (Génie Côtier) de Mademoiselle HADJ-RABIA Nacima. Le responsable de son stage était Monsieur Jean Marc ROUSSET. Nous avons enregistré les mesures de pression du capteur M3 situé sur la face avant de la paroi perforée. Les mesures des vitesses ont été enregistrées aux points M1 ; M2 ; M3. (Fig :1).

La figure 2 représente l’enregistrement des vitesses lors l’impact d’une vague déferlante. La figure 3 représente l’enregistrement simultané des pressions enregistrées par le capteur M3

Position des points de mesure.jpg Évolution des vitesses lors de l’impact.jpg Enregistrement simultané des vitesses et des pressions lors de l’impact.jpg

De ces mesures et des visualisations associées (voir photos) il nous est possible de proposer la théorie suivante :

Au moment de l’impact d’une vague « déferlante » (Figure 4) :

  • la vitesse des particules d’eau de la partie supérieure de la vague a une composante verticale « négative ».
  • La vitesse des particules d’eau de la partie inférieure de la vague a une composante « positive »
  • L’eau étant incompressible, ces deux composantes s’opposent et bloquent instantanément (mais pas de façon persistante) toute évolution de la vague sur une durée très courte.
  • Cet effet de blocage « instantané » de la vague déferlante, sans run-up est visible sur la (Photo : 1)
  • Ce n’est qu’après cette phase très courte, et compte tenu des vitesses des particules d’eau qui suivent, que la vague reprend son mouvement, elle peut générer une gerbe d’eau au droit de la paroi, qui à mon avis n’est pas exactement un run-up.
Dynamique de l’impact d’une vague déferlante.jpg

Par contre, dans le cas où l’impact ne correspond pas à l’instant précis du déferlement sur la paroi, il se produit un phénomène de run-up très visible sur la photo 2.

Dynamique du Run-up.jpg



Quantification des efforts

L’enregistrement des variations de vitesse au moment de l’impact (Figure 2) nous donne les résultats suivants :

  • Variation de vitesse au moment de l’impact : ∆U ≈ 3m/s.
  • Durée du choc : ∆t ≈ 0,5s.
  • D’où une décélération correspondante : Γ = ∆U/∆t ≈ 6 m/s2.

La percussion dûe à l’effet de claque d’une vague sur la paroi produit une force égale à :

f=m .Γ , (m étant la masse de la vague à prendre en compte)

  • Dans le cas particulier de notre étude (largeur de canal l = 0,8 m ; longueur d’onde L = 1,6 m (prendre L/2) ; profondeur d’eau p = 0,6 m), même en introduisant un coefficient « k » pour ne prendre en compte qu’une partie de la masse d’une demi vague, l’effort est considérable : (F = « k ».2304 N) avec k : coefficient pondérateur de masse.


Conclusion

L’effet de claque de la vague a été étudié sur la paroi extérieure d’un caisson JARLAN, c'est-à-dire sur une paroi perforée. Or, si l’effort généré par l’impact était dû à l’existence d’une bulle d’air, celle-ci se serait échappée par les orifices de la paroi.

Pour moi, l’effet de claque d’une vague est dû à une variation de quantité de mouvement et non à la compressibilité d’une bulle d’air emmagasinée par la vague au moment du déferlement.

Par contre, il est nécessaire d’avoir une estimation la plus précise possible de la valeur du coefficient k pour connaître la quantité de la masse de la vague à prendre en compte :

  • Analyse de la variation instantanée du champ des vitesses sur toute la masse de la demi-vague au moment de l’impact (elle n’est peut être pas identique en chaque point de la vague)
  • Étude de l’impact pour différentes conditions de houle déferlante.


Remarques particulières

  1. Vous trouverez ci-après sur la figure 6 les enregistrements des vitesses et des pressions pour une autre configuration de vague. Le phénomène est identique.
  2. Les travaux de GUILCHER (1959) ainsi que ceux de FICHAUT et SUANEZ (2007) font état des « amas cyclopéens » de Banneg (ile de l’archipel de Molène –Finistère-).

Sur cette ile, des blocs de plusieurs tonnes ont été projetés en haut de la falaise lors de tempêtes. L’explication n’a pu être donnée par des considérations uniquement géologiques, mais si on prend en compte le phénomène physique de variation de quantité de mouvement lors du phénomène de claque d’une vague, et compte tenu de la configuration géologique au regard de la houle, il serait bon de vérifier si la théorie de variation de quantité de mouvement d’une vague déferlante n’explique pas le phénomène. Les blocs sont de masse importante, mais les efforts générés lors de l’impact d’une vague (variation de quantité de mouvement) le sont également.

Enregistrement simultané des vitesses et des pressions lors de l’impact de la vague.jpg


Références concernant les amas cyclopéens de Banneng

  • GUILCHER A. 1959 – L’archipel de Molène (Finistère) Etude morphologique. Revue de géographie Physique et de Géologie.
  • FICHAUT B. & HALLÉGOUËT B. 1989 – Banneg, une île dans la tempête. Penn ar Bed, n° 135, pp. 36-43.




Artcile rédigé par le Professeur Michel BÉLORGEY. Association POSEIDOM. belorgey@poseidom.fr

Outils personnels