Wikibardig:Présence de terriers d’animaux fouisseurs dans un tronçon de digue
Les animaux fouisseur sont des animaux, terrestres ou aquatiques, qui creusent le sol et les sédiments pour y passer tout ou partie de leur vie. Ils peuvent creuser des trous ou des galeries (simples ou multiples, à une ou plusieurs sorties) et y vivre seuls, en famille ou en groupes.
Terrier de blaireau traversant la digue - photo Symadrem
Les désordres imputables aux fouisseurs
Les risques et dégradations engendrés directement ou indirectement par l'activité des fouisseurs dans les digues, ou à leur proximité immédiate, sont multiples :
- Initiation ou développement de l’érosion interne pouvant conduire à une brèche (par raccourcissement des lignes de fuite) ;
- Fuites directes (terriers traversants) ;
- Affaissements / irrégularités en crête ;
- Fragilisation au plan mécanique (berges, talus côté fleuve) ;
- Perforation des dispositifs d’imperméabilisation ;
- Ouvertures en dessous du niveau d’eau
- Déstabilisation des maçonneries, perrés, chaussées, revêtements et des routes.
Quelles espèces
Selon France digue (https://www.france-digues.fr/actualites/digues-fluviales-apprendre-a-vivre-avec-les-blaireaux/ ),en France, au dire des témoignages des nombreux gestionnaires de digues, le blaireau a été mentionné comme étant responsable de dégâts importants sur les parties en remblai d’ouvrages hydrauliques de taille importante et régulièrement entretenus.
Le rat musqué, le ragondin et le castor sont des fouisseurs aquatiques. Ils peuvent porter atteinte aux digues à charge permanente ou aux tronçons de digues de protection contre les inondations situées à proximité immédiate d’une berge de cours d’eau permanent.
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Blaireau photo https://www.france-digues.fr
Enfin, la taupe, ne creusant que des galeries superficielles, ne porte pas atteinte à la sécurité des digues. Il en est de même pour le lapin, du moins tant que l’on ne laisse pas se développer une population envahissante, susceptible de dégrader la surface des talus.
Plusieurs entrées de terriers de ragondin visibles sur la digue du canal de Veendiep aux Pays-Bas. Mars 2012. Photo : M. Rothengatter
La réglementation sur la chasse ou sur l'élimination de ces animaux (piégeage…) est très stricte en France. Aussi, les moyens dissuasifs sont toujours privilégiés.
Les moyens de lutte dissuasifs
- Le fauchage ou le débroussaillage régulier, troublant la quiétude des lieux et empêchant le développement de zones de couvert, limite les risques d'installation de populations de certains fouisseurs de tempérament craintif (ex : blaireau).
- La présence humaine régulière de garde digues ou du public encouragée au travers d’activités sportives, ludiques… est un autre moyen de lutte.
- La mise en place, sur les talus, de dispositifs de protection mécanique est également une solution généralement efficace mais peut être coûteuse :
- Grillage galvanisé, revêtu de terre végétale ;
- Couche de revêtement à base de matériau lourd ou résistant, tels que des enrochements jointifs.
- Les moyens dissuasifs sont, dans tous les cas, à préférer aux moyens de destruction ou de capture des animaux fouisseurs. Le recours à ces derniers - dont l'effet s'avère temporaire - est à réserver aux situations graves ou urgentes.
A titre de comparaison, on peut noter que les Pays-Bas, où les digues sont essentielles, ont classé le blaireau comme espèce protégée, montrant ainsi qu’il est possible de concilier l’entretien des digues et la présence du blaireau.
Dispositives curatives
Injection de terriers
Des techniques d'injection de coulis durcissables (ciment-bentonite) ont été essayé, en action curative, pour colmater les galeries de fouisseurs, sources de fuites et de fragilisation des digues. Celles-ci se sont avérées sans grand succès : les quantités consommées sont importantes et supérieures aux prévisions, de plus il est très difficile compte tenu de ses ramifications d’injecter complètement un terrier (notamment de blaireau) mais, surtout, les dégradations ont repris, par la suite, au voisinage des terriers injectés (d'où la nécessité de prolonger une telle intervention curative par une action dissuasive). Dans l’état actuel de nos connaissances cette technique ne semble pas efficace.
Déblaiement et reconstruction de la zone touchée
Plus simplement, on peut procéder au déblaiement par moyens mécaniques du volume de digue miné par le réseau de galeries, et à la reconstituer à l'identique avec le matériau extrait recompacté (si sa nature et sa teneur en eau conviennent à cet usage).
Dispositifs d'étanchéité
Pour rétablir l'étanchéité interne d'une digue minée par des galeries de fouisseurs, les techniques suivantes sont envisageables :
- Les parois moulées, les parois minces ou rideau de palplanches dans l'axe de la digue ;
- La recharge en matériau étanche côté rivière ;
- La mise en place d’un masque étanche en amont (géomembrane, béton bitumineux, …) ;
- Le traitement des matériaux existants avec adjonction de liants comme les mélanges en place ou sols mixés ou l’injection via la technique du jet grouting.
La paroi moulée ou le rideau de palplanches, correctement dimensionnés, offrent l'avantage de régler définitivement le problème de l'étanchéité interne de la digue et ce, même si la détérioration par les terriers se poursuit après les travaux. En effet, les animaux ne pourront plus creuser des terriers, à travers les palplanches de façon évidente, mais aussi à travers la paroi moulée après prise du coulis. Par contre, de tels procédés ne contribuent pas à renforcer le talus de digue côté fleuve : ceci peut être gênant si le développement des terriers (qui va continuer) concerne et fragilise plus spécialement cette zone. Ces techniques sont, en outre, coûteuses et peuvent avoir des impacts sur l’hydrogéologie (selon la profondeur du rideau).
Création de terriers artificiels
La création de terriers artificiels permet aux animaux de rester sur leur territoire tout en assurant la sureté de l’ouvrage hydraulique. La technique consiste à protéger la digue en remblais par un grillage puis d’enterrer les terriers artificiels dans une butte adjacente et à proximité immédiate des terriers naturels. Parallèlement, des dispositifs anti-retour d’animaux permettant de sortir de leur terrier mais pas de le réintégrer sont posés. Par la suite, le tronçon de digue détérioré sera reconstitué.
Création de terriers artificiels photo Paul Arnold Environment Agency
Butte accueillant les terriers artificiels photo Paul Arnold Environment Agency
Pour en savoir plus :
https://alsace.lpo.fr/images/stories/Articles/docLPO/Terrier-digue-final-.pdf
https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/accident/52885/
Ciozzani, M. (2021). Study of lime treated slurries for repairing animal burrowed dykes.
Poulain, D., Tourment. R., Patouillard. S., Chalus. B., Chapuis.H., et al.. Techniques de réparation des digues. 26ème congrès des grands barrages CIGB, Jul 2018, Vienne, Autriche. ⟨hal-02607870⟩
Ydenberg, R. C., Van loon, E., Bos, D., et al. Damage to dykes and levees in The Netherlands is extensive and increases with muskrat (Ondatra zibethicus) density. Lutra, 2019, vol. 62, p.
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Pour plus d'information sur l'auteur : INRAE - UMR RECOVER - Equipe G2DR
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