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Arsenic (HU)

De Wikibardig

Traduction anglaise : Arsenic

mot en chantier

Dernière mise à jour : 07/09/2022

Métalloïde de symbole As et de numéro atomique 33 ; bien que l'arsenic ait des propriétés intermédiaires entre celles des métaux et des non-métaux, il est souvent classé parmi les métaux lourds du fait de sa toxicité.

Sommaire

Nature et différentes formes physico-chimiques

L'arsenic est un élément relativement répandu dans la croute terrestre (en moyenne 2 mg/kg, mais pouvant atteindre 100 à 200 mg/kg). Son principal minerai est l'arsénopyrite, les autres minerais d’arsenic sont le réalgar et l’orpiment. L’arsenic est également présent dans de nombreux autres minéraux, particulièrement les arséniures, les arséniates, quelques sulfosels. On le trouve également sous forme native (www.geowiki.fr).

L'arsenic et ses composés peuvent se présenter sous deux formes principales : inorganiques ou organiques.

  • l'arsenic est dit inorganique, en dehors de sa forme pure, quand il est lié à l’oxygène, au chlore ou au soufre ; il est alors extrêmement toxique, même à très faible dose, et ceci d'autant plus qu'il a perdu moins d'électrons, sachant que l'on trouve l'arsenic oxydé essentiellement sous forme trivalente : As(III) ou pentavalente : As(V) ; par exemple le trioxyde d'arsenic (As2O3), d'ailleurs souvent confondu avec le corps pur et nommé simplement arsenic, est un poison violent ;
  • l'arsenic est dit organique quand il est chimiquement lié au carbone ou à l'hydrogène ; sous cette forme il reste toxique à forte dose mais constitue un oligo-élément dont les besoins pour l’homme sont évalués entre 10 et 20 µg par jour. Certains composés méthylés organiques peuvent cependant être également très toxiques, voire plus toxiques que les composés inorganiques (Bisson et al., 2010) et figure 1.


Figure 1 : Toxicité comparé de certains composés d'arsenic ; Source : Bisson et al., 2010.

Sources et concentrations moyennes

Différentes sources de l'arsenic dans l'environnement

D'après (Manlius et al, 2009) plus de 70 pays sont aujourd'hui concernés par des concentrations en arsenic trop fortes dans les eaux de surface ou les eaux souterraines destinées à la consommation humaine. Cette contamination peut être naturelle (c'est en particulier le cas dans les grands deltas fluviaux d'Asie et en particulier au Bengale et au Bangladesh qui sont les deux pays les plus touchés). Elle peut également être, au moins en partie, d'origine humaine, avec des sources locales (l'arsenic est très souvent présent dans les minerais donc dans les rejets miniers) ou plus diffuses. L'arsenic est en effet utilisé pour différents usages :

  • comme antiparasite (arsenicage) sous la forme d'arseniate de soude ;
  • pour améliorer la dureté de certains métaux (plombs de chasse) ;
  • pour "doper" certains semi-conducteurs (alliages avec du gallium ou de l'indium, par exemple arséniure de gallium) utilisé en particulier pour les cellules photovoltaïques et les diodes électroluminescentes (DEL) ;
  • comme pesticide ou désherbant, même si son utilisation comme raticide (ancienne "mort aux rats") ou comme produits anti-fourmis (dimethylarsinate de sodium) est maintenant interdite dans l'UE ;
  • mélangé avec du cuivre et du chrome (CCA) pour le traitement du bois ;
  • etc.

Les sources vers l'environnement sont donc à la fois naturelle (érosion, incendies, volcans) et anthropiques. En France, la majeure partie de l'arsenic atmosphérique est cependant d’origine industrielle et provient de la combustion de produits fossiles (charbons, pétroles, huiles), contenant un pourcentage important d'arsenic (Bisson et al, 2010). L'origine de la pollution anthropique des sols et des eaux est plus diversifiée (www.senat.fr) et figure 2 :

  • les activités industrielles (industrie du plomb, du cuivre, du zinc, du cuir, du bois, industrie chimique, etc.) constituent la cause principale (70% de la masse) ;
  • les décharges apportent environ 20% ;
  • l'agriculture (engrais, pesticides) contribue pour 9%.


Figure 2 : Origine anthropique des pollutions à l'arsenic ; Source : [https://www.senat.fr/rap/l00-261/l00-26185.html www.senat.fr.

De façon générale l’arsenic présent dans les sols est majoritairement d’origine géologique (figure 3). Manlius et al (2009) indiquent que la production industrielle d’arsenic cumulée depuis le début de l’ère industrielle représente moins de 10% de la quantité totale dans la seule pédosphère. Localement les sources anthropiques (sites miniers ou sites industriels) peuvent cependant être largement dominantes, principalement pour les rejets dans l'eau (figure 4). Il est d'ailleurs intéressant de noter, en comparant les figures 3 et 4, que les sites miniers sont souvent situés dans les zones où la concentration est la plus forte dans les sols de surface.


Figure 3 : La concentration moyenne en arsenic des sols de surface de France métropolitaine semble principalement due à la géologie ; Source : CGDD, 2019.


Figure 4 : Points noirs de rejets d'arsenic d'origine anthropique (hors agriculture) supérieurs ou égaux à 5 kg/an dans les eaux de surface ; Source : Bisson et al., 2010.

Contribution des rejets d'assainissement

Lors du projet AMPERE (Coquery et al, 2011 et http://projetamperes.cemagref.fr/), les concentrations en arsenic ont été mesurées à l'entrée et à la sortie de 21 stations d'épuration françaises. Les concentrations moyennes trouvées sont très variables mais se situent généralement dans la fourchette 1 à 10 μg/L, avec des rendements épuratoires (sortie traitement secondaire) de l'ordre de 70%. La masse rejetée aux milieux aquatiques a été estimée en moyenne à 100 μg/j/hab, soit 2 à 2,5 tonnes par an.

Il n'existe pas de synthèse des concentrations d'arsenic observées dans les rejets urbains de temps de pluie. Une telle synthèse a été effectuée aux États Unis (Masoner et al, 2019) qui indique des valeurs du même ordre de grandeur que celles observées sur les eaux usées brutes (3,2 μg/L en moyenne). Comme les volumes annuels rejetés par temps de pluie sont généralement beaucoup plus faibles que ceux rejetés par temps sec, la contribution du temps de pluie sur une base annuelle est donc assez faible par rapport à celle du temps sec. En revanche ces apports sont répartis sur une durée beaucoup plus courte et peuvent conduire à des concentrations plus fortes dans les milieux aquatiques.

L'origine de l'arsenic présent dans les eaux de ruissellement est peu connue. Dans les pays froids et les zones de montagne la responsabilité de l'arsenic souvent présent dans les sels de déverglaçage est probable (Saegrov et al., 2000). Rennes métropole a observé des retombées atmosphériques de l'ordre de 0,2 μg/j/m2 (www.uve-rennesmetropole.fr). Si on extrapole ce chiffre au territoire de la France métropolitaine, on obtient une masse déposée d'environ 110 kg par an. Cette masse paraît très faible par rapport aux flux issus du ruissellement urbain et l'érosion naturelle des sols constitue probablement une source plus importante.

Globalement les apports en arsenic aux milieux aquatiques dus aux rejets d'assainissement ne sont donc pas très importants et les concentrations moyennes observées dans les eaux rejetées sont presque toujours inférieures à la limite de concentration dans l'eau destinée à la consommation humaine qui est de 10 μg/L.

Une autre source d'introduction dans l'environnement due à l'assainissement est constituée par les boues de station d'épuration. Les concentrations trouvées dans les boues (Coquery et al, 2011) sont comprises entre 10 et 100 mg/kg de matières sèche. La production totale de boues est d'environ 1 million de tonnes de matières sèches, dont environ les 2/3 sont épandues. La masse totale d'arsenic dans les boues est donc de 10 tonnes par an, soit environ 3 fois plus que les rejets directs dans l'eau, ce qui est compatible avec le rendement observé des stations (environ 70%). Il est à noter que l'arrêté du 08/01/98 fixant les prescriptions techniques applicables aux épandages de boues sur les sols agricoles ne fixe pas de valeur seuil pour l'arsenic. L'Union Européenne recommande cependant depuis 1987 de limiter à 0,35 kg/ha la dose d'arsenic apportée annuellement au sol par l'intermédiaire de boues et, aux USA, l'EPA recommande une quantité cumulée de 41 kg par hectare avec un maximum de 2 kg par hectare et par an (Morin & Jullien, 2014).

Toxicité et danger associés

Impacts possibles sur la santé

"L’arsenic est probablement le contaminant environnemental responsable des risques les plus élevés de morbidité et de mortalité à travers le monde, en raison de la combinaison de deux facteurs : son niveau de toxicité et le nombre de personnes exposées" (Bisson et al., 2010). Comme indiqué précédemment l'arsenic est très toxique sous ses formes inorganiques et sous certaines formes méthylées. Sa présence dans les eaux contaminées utilisées pour la boisson, la préparation des aliments et l’irrigation constitue la plus forte menace pour la santé publique. L’exposition prolongée à l’arsenic dans l’eau de boisson et les aliments peut provoquer des cancers et des lésions cutanées. Un lien a aussi été établi avec les maladies cardiovasculaires et le diabète. On a aussi attribué à l’exposition in utero et au cours de la petite enfance des effets négatifs sur le développement cognitif et un nombre plus élevé de décès chez les jeunes adultes.

Les risques de cancers cutanés (carcinomes et mélanomes), de cancer de la vessie et du poumon sont démontrés en cas de consommation d'eau avec une concentration supérieure à 100 μg/L. Certaines études semblent montrer que des risques subsistent pour des concentrations de l'ordre de 50 μg/L (Bisson et al., 2010). Pour mémoire cette valeur de 50 μg/L a servi de référence pour l'eau destinée à la consommation humaine en France jusqu'à la fin du XXème siècle. Cette limite de concentration est maintenant de 10 μg/L partout en Europe (directive n° 98/83/CE de l’Union Européenne du 3/11/1998).

En 2009 l'OMS estimait que plus de 130 millions de personnes dans le monde consommaient de l'eau avec une concentration en arsenic supérieure à 50 μg/L (Van Halem et al., 2009 cités par Bisson et al., 2010.)

Impacts possibles sur les milieux aquatiques

L'arsenic n'est bio-assimilable que sous forme liquide. Sa solubilité dépend de sa forme chimique, les dérivés pentavalents semblant plus solubles que les dérivés trivalents. Les risques de relargage dépendent à la fois de facteurs physico-chimiques (pH, potentiel d'oxydo-réduction, concentrations en phosphate, en fer, ou en sulfure, température, etc.) et de l'activité microbiologique qui peut conduire à la dissolution de certains hydroxydes. Globalement l'arsenic est surtout présent dans les eaux sous la forme d'arséniates (H2AsO4 et HAsO42-). Des composés méthylés très toxiques (MMA - acide monométhylarsénique ou DMA - acide diméthylarsinique) peuvent cependant provenir de la méthylation de l'arsenic minéral par les algues ou par la dégradation microbienne des composés organiques complexés (Bisson et al, 2010)

L’arsenic est faiblement bioaccumulable chez les crustacés et ne semblent pas l'être chez les poissons.

Les valeurs de concentrations sans effet observé (NOEC pour No Observable Effect Concentration), de Valeur guide environnementale (VGE) (concentration moyenne annuelle dans l'eau) et de concentration maximale admissible (MAC pour Maximum Admissible Concentration) sont données dans le tableau de la figure 5 pour les eaux douces et marines. Les valeurs de VGE et de MAC sont fondées sur la proposition de norme de qualité pour la santé humaine via la consommation de produits de la pêche, ce qui explique pourquoi elles sont beaucoup plus faibles que les concentrations sans effet observable chez les organismes aquatiques.


Figure 5 : Concentrations sans effet observable, valeur guide environnementale et concentration maximale admissible pour l'arsenic dans les eaux douces et marines ; Source : substances.ineris.fr, MaJ 2019

Globalement les risques présentés par la présence d'arsenic dans l'eau sont beaucoup plus importants pour la santé humaine que pour les écosystèmes aquatiques.

Bibliographie  :

  • Baize, D., Courbe, C., Suc, O., Schwartz, C., Tercé, M., Bispo, A., Sterckman, T., Ciesielski, H. (2006) : Épandages de boues d’épuration urbaines sur des terres agricoles : impacts sur la composition en éléments en traces des sols et des grains de blé tendre ; Courrier de l’environnement de l’INRA n°53, décembre 2006 ; téléchargeable sur : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01199208/file/C53Baize.pdf
  • Coquery M., Pomiès M., Martin-Ruel S., Budzinski H., Miège C., Esperanza M., Soulier C., Choubert J.-M.(2011) : Mesurer les micropolluants dans les eaux brutes et traitées - Protocoles et résultats pour l'analyse des concentrations et des flux ; Techniques Sciences et Méthodes, 1/2 : 25-43 ; disponible sur : projetamperes.cemagref.fr
  • CGDD (2019) : La contamination des sols par les métaux ; Conseil Général au Développement Durable ; disponbible sur : www.notre-environnement.gouv.fr
  • Desportes I. (coord.) (2007) : Bilan des flux de contaminants entrant sur les sols agricoles de France métropolitaine ; étude ADEME-SOGREAH ; rapport final ; 330p. ; disponible sur le site de l'ADEME.
  • Masoner, J.R., Kolpin, D.W., Cozzarelli, I.M., Barber, L.B., Burden, D.S., Foreman, W.T., Forshay, K.J., Furlong, E.T., Groves, J.F., Hladik, M.L., Hopton, M.E., Jaeschke, J.B., Keefe, S.H., Krabbenhoft, D.P., Lowrance, R., Romanok, K.M., Rus, D.L., Selbig, W.R., Williams, B.H., Bradley, B.M. (2019) : Urban Stormwater: An Overlooked Pathway of Extensive Mixed Contaminants to Surface and Groundwaters in the United States ; Environ Sci Technol. 2019 Sep 3; 53(17): 10070–10081. ; disponible sur www.ncbi.nlm.nih.gov
  • Morin, A., Jullien, D. (2014) : Aspects réglementaires sur l’arsenic ; Séminaire Société des industries minérales, Sep 2000, Salsigne, France. ineris-00972209 ; disponible sur hal-ineris.archives-ouvertes.fr
  • Saegrov, S., Milina, J., Thorolfsson, S.T. (2000) : Urban drainage in cold climates ; UNESCO ; IHP-V ; Technical Documents in Hydrology ; No. 40, Vol. II ; 199p. ; disponible sur unesdoc.unesco.org
  • Van Halem, D., Bakker, S.A., Amy, G.L., Van Dijk, J.C. (2009) : Arsenic in drinking water : a worldwide water quality concern for water supply companies ; Drink. Wat. Eng.Sci., 2, p. 29-34.

Pour en savoir plus :

  • Bisson, M., La Rocca, B., Houeix, N., Andres, S. (2010) : L'arsenic et ses dérivés inorganiques ; fiche de données toxicologiques et environnementales ; INERIS ; 124p. ; disponible sur le Portail substances chimiques de l'INERIS.
  • Manlius, N., Battaglia-Brunet, F., Michel, C. (2009) : Pollution des eaux par l’arsenic et acceptabilité des procédés de biotraitement ; Projet ANR COBIAS, Délivrable D14, version finale ; 176p. ; disponible sur infoterre.brgm.fr.
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