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B.06 - Précipitations neigeuses

De Wikibardig

Sommaire

Introduction

Les hydrométéores[1] qui se forment dans les nuages sont à des températures très froides, souvent au-dessous 0 °C. C'est pour cette raison que presque toutes les précipitations qui arrivent au sol (liquide ou solide) proviennent de la formation de cristaux de glace ou d'eau congelée. Ces précipitations solides tombent et fondent en cours de route si la température de l'air atteint plus de 0 °C et arrivent sous forme liquide au sol (sinon elles restent sous forme solide). La limite inférieure de la zone où ces précipitations fondent est appelée limite pluie-neige (Fig. 1). Cette vision atmosphérique ne se traduit pas directement de la même manière au sol. En pratique, la limite pluie neige est le plus souvent assimilée à l'altitude à partir de laquelle la neige peut tenir au sol, et se situe au moins une centaine de mètre au-dessus (fiche B.16).


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Observation de la phase

L'observation « humaine » reste encore le moyen le plus sûr et le plus courant pour qualifier la phase des précipitations. Des observations régulières sont effectuées sur les stations dites synoptiques avec mesure du « temps présent » ou sur les principaux aéroports.

Le disdromètre[2] est un instrument conçu pour mesurer la distribution de diamètre des hydrométéores ainsi que leur vitesse de chute. La distribution de diamètre et le nombre de particules de chaque diamètre permet de calculer le taux de précipitation. La vitesse de chute est reliée, quant à elle, à la phase de la précipitation. Bien qu'utilisé en opérationnel, cet appareil reste encore souvent réservé à des applications de recherche.

Les disdromètres optiques (Fig. 2) utilisent un faisceau lumineux qui sera coupé par le passage de l'hydrométéore. Le dispositif est composé d'un émetteur et d'un ou deux capteurs horizontalement avec un espace entre eux pour le passage de la précipitation.


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Ces mesures restent limitées à un point et il est donc intéressant d'estimer l'altitude de la limite pluie – neige. En présence de repères non enneigés, la limite pluie – neige (LPN) peut être estimée visuellement par un observateur (Fig. 3)


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La mesure des précipitations par radar permet aussi de déterminer l'altitude de la limite pluie – neige. En effet au passage de la zone de fonte, la réflectivité augmente de manière significative (Fig. 4.a). Cette augmentation est appelée « bande brillante » (fiche B.04) et correspond à la zone entre l'isotherme 0 °C et la limite pluie – neige. Cette bande a une épaisseur (Fabry and Zawadzki, 1995) de 150 à 800 m pour une valeur moyenne de 300 m. Elle est identifiable par les radars assurant une exploration volumique complète mais aussi des profileurs verticaux (Fig. 4b). Les radars avec double polarisation permettent d'avoir en exploitant la diversité de polarisation une estimation de la taille et de la nature des hydrométéores. Ces applications restent pour l'instant plutôt du domaine de la recherche.


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Critères de détermination de la phase

La température de l'air joue un rôle principal dans la phase des précipitations (fiche B.15, section 3.1). Si en dessous de – 1 °C, les précipitations sont sous forme de neige et au-dessus de 4 °C sous forme de pluie, dans cette plage un événement peut aussi bien être sous forme de neige que sous forme de pluie, et dans des cas plus limités sous forme mixte (i.e., station dans la zone comprise entre l'isotherme 0 °C et la LPN). La température seuil représentant le mieux la LPN se situe généralement entre 1 et 2 °C (Fig. 5).


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La courbe de la figure ci-dessus est parfois appliquée comme une proportion de pluie et de neige à la température considérée assimilant tous les épisodes à des précipitations mixtes. Si pour un épisode donné, cette vision est biaisée, cumuler sur la saison cette approche permet de respecter cette répartition empirique.

La prise en compte de l'humidité de l'air (Fig. 6) permet dans la gamme de température de -1 à 4 °C de déterminer avec certitude la phase des précipitations pour 25 % des épisodes.


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La régression logistique suivante permet de définir une probabilité d'avoir un épisode pluvieux (Koistinen and Saltikoff, 1998). Cette formulation établie en Finlande a été appliquée avec succès dans les Alpes suisses et en France.


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avec p la probabilité d'avoir de la pluie, T la température de l'air en °C et RH l'humidité relative en %.


Caractérisation des précipitations neigeuses

La densité de la neige [3] fraîchement tombée est très variable. Cette variation dépend du type de cristaux favorisés par la température (Fig. 7) dans la couche où la neige se forme, et du vent qui est un facteur limitatif à leur croissance. De plus, la température de l'atmosphère variant avec l'altitude, on observe généralement une variété de types de flocons. Finalement, la friction près du sol par le déplacement dû au vent va briser certains cristaux et ainsi modifier le rapport entre la masse des flocons et l'air contenu dans la congère.

La masse volumique de la neige fraîche est comprise entre 70 et 165 kg/m3 mais souvent estimée à 100 kg/m3. Elle peut être approchée en fonction de la température de l'air par la formule suivante (Hedstrom and Pomeroy, 1998) :


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avec rs la masse volumique de la neige en kg/m3 et T la température de l'air.


La hauteur de neige fraîche sera soit mesurée par un observateur avec une planche à neige (Fig. 8a), soit par un capteur de hauteur de neige. L'équivalent en eau des précipitations solides sera mesurée soit par un pluviomètre à augets réchauffés, soit par un pluviomètre à pesée (Fig. 8b). Il pourra aussi être calculé à partir de la hauteur et de l'estimation de la densité.


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La mesure des précipitations solides est particulièrement sensible au vent. Il est donc opportun (bien que peu répandu en France, notamment en raison des coûts) d'installer des brise-vents (Fig. 9a). Pour un vent d'un peu plus de 3 m/s et un brise vent simple, la perte de captation d'un pluviomètre (200 cm²) est de la moitié de la précipitation solide (Fig. 9b ; voir également la fiche B.02).


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La distribution spatiale des hauteurs de neige fraîche est très variable. Ces hauteurs sont bien évidemment dépendantes de la pente et de l'altitude, mais aussi du transport par la vent et des obstacles perturbants l'écoulement. La représentativité spatiale d'un point de mesure est donc toujours très délicate (Fig. 10).


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Incertitudes liées aux précipitations neigeuses

Les incertitudes sont très largement tributaires de la répartition des surfaces du bassin versant en fonction de l'altitude, appelée aussi courbe hypsométrique (Fig. 11). Ce point est plus particulièrement illustré dans la fiche B.15. Les précipitations solides ne contribuant pas directement au ruissellement, il est possible d'arriver au final à des erreurs d'estimation des précipitations liquides de plusieurs dizaines de mm.

Exemple 1 (bassin versant de l’Isère). Comme évoqué précédemment, la température de l'air « seuil » pour la détermination de la phase, est proche de 1 °C en moyenne. Cependant, pour certains épisodes, on observe encore de la neige à 4°C. Considérant un gradient thermique de 0,5°C pour 100 m, l'altitude de la limite Pluie – Neige sera 600 m plus bas que l'estimation basée sur la moyenne. Dans le cas de la zone AP Haute Isère et considérant en première estimation la LPN à 2000 m, une erreur de 600 m représente plus de 30 % de la surface du bassin (Fig. 11)… Dans le secteur, la lame d'eau moyenne journalière décennale est de l'ordre de 80 mm. Dans ce cas, l'estimation des précipitations liquides passe de 32 à 56 mm …


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Voir également

Fiche B.02 – Observation ponctuelle de pluie au sol

Fiche B.04 – Estimation d’une pluie de bassin par observation radar

Fiche B.15 – Prévision de la température

Fiche B.16 – Prévision de la limite Pluie – Neige


Pour aller plus loin

  • Fabry, F., and I. Zawadzki, 1995: Long-term radar observations of the melting layer of precipitation and their interpretation. J. Atmos. Sci., 52, 832–851.
  • Froidurot S., 2012 : Recherche de variables explicatives pour la phase des précipitations - Application aux Alpes suisses. Rapport M2R STE UJF, Grenoble
  • Froidurot S. et al, 2013 : Sensitivity of precipitation phase over the Swiss Alps to different meteorological variables. J. Hydrometeor, 13,
  • Hedstrom, N.R., and Pomeroy, J.W. 1998. Accumulation of intercepted snow in the boreal forest: measurements and modelling. Hydrol. Processes, 12, 1611 -1623.
  • Koistinen J. and Saltikoff E., 1998 : Experience of customer products of accumulated snow, sleet and rain. In C. Collier (Ed.), COST75 Advanced Weather Radar Systems, Volume EUR 18567, pp. 397-406.
  • Smith C.D., 2009 : The Relationships Between Snowfall Catch Efficiency and Wind Speed for the Geonor T-200B Precipitation Gauge Utilizing Various Wind Shield Configurations, Proceedings of the 77th Annual Western Snow Conference
  • United States. Army. Corps of Engineers. 1956. Snow hydrology; summary report of the snow investigations.

  1. http://galileo.cyberscol.qc.ca/InterMet/precipitation/formation_precipitation.htm
  2. http://fr.wikipedia.org/wiki/Capteur_de_gouttelettes
  3. http://fr.wikipedia.org/wiki/Neige
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