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Changement climatique - invasions et risques sanitaires

De Wikibardig

Sommaire

Conséquences du changement climatique sur les écosystèmes et leurs fonctions

Le changement climatique désigne l’ensemble des modifications des conditions météorologiques observées sur une longue période. Le réchauffement planétaire n'étant pas uniforme la circulation de l'atmosphère se trouve différemment impactée suivant le lieu considéré. La modification de la circulation atmosphérique bouleverse de nombreux paramètres tels que la configuration des vents, les températures, la distribution des précipitations, ou encore le type et la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes. Si ses causes, naturelles et anthropiques, sont assez bien connues, les conséquences et les impacts du changement climatique sont plus incertaines et plus difficiles à évaluer.

Toutefois, dès à présent, certains effets sont déjà perceptibles : le niveau de la mer a augmenté de 10 à 20 cm, le Mont Kilimandjaro a perdu 82 % de sa masse glaciaire, la forêt boréale de l'Alaska a avancé vers le Nord d'environ 100km pour chaque degré d'augmentation de température ([1] Rapport « La diversité biologique et les changements climatiques »). Ainsi, les préoccupations et les inquiétudes se font de plus en plus nombreuses vis-à-vis des conséquences que pourrait avoir le changement climatique sur les écosystèmes. En effet, les différentes espèces animales et végétales se sont adaptées à leur climat local. Certaines peuvent supporter de petites variations de température, mais elles ne supporteraient pas un changement global, brutal et durable. Les changements actuels surviennent si rapidement qu'ils pourraient non seulement modifier considérablement la distribution, la répartition géographique et la biologie des espèces animales et végétales, mais également être à l'origine d'une vague massive de disparitions d'espèces sur l'ensemble de la planète.

La perte de biodiversité est une conséquence négative en tant que telle, mais cette perte signifie également, par effet domino, la perte des fonctions et des services que pouvaient rendre ces écosystèmes. Ces fonctions et services qui s'avèrent, d'ailleurs, particulièrement utiles face aux problématiques de régulation du climat et d’événements extrêmes. Par exemple, en absorbant et en stockant naturellement le carbone, les forêts comptent parmi les principaux puits de carbone de la planète. Elles permettent de limiter les effets du changement climatique et de participer à l'équilibre du climat. D'autre part, les mangroves, en formant un bouclier naturel contre les tempêtes, permettent de lutter contre l'érosion et la protection des côtes. Enfin, les Zones humides sont de remarquables zones tampons qui agissent comme des éponges: elles sont à la fois capables d'absorber une grande quantité des eaux des crues et de garantir l’écoulement en période d’étiage.

Ainsi, les conséquences du changement climatique sont donc amplifiées par la perte des fonctions des écosystèmes, eux-mêmes perturbés par le changement climatique.


Exemples d'écosystèmes et de leur vulnérabilité vis-à-vis du changement climatique


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  • Modification des conditions climatiques et des aires de répartition des espèces
Sous nos latitudes tempérées, le changement climatique a tendance à modifier la longueur relative des saisons et cela a des incidences directes et indirectes sur les espèces. Les aires de répartition sont en partie déterminées par les stratégies migratoires, les types d’habitats, les régimes alimentaires et la température optimale pour le développement des espèces. Ainsi, la limite nord et l'altitude des habitats d’une grande majorité d'espèces sont définies suivant les contraintes climatiques. Or, entre 1990 et 2008, les températures moyennes ont augmenté d'environ 1°C en Europe, ce qui revient à un décalage des températures vers le nord de 249 kilomètres. Les aires de répartition des papillons et des oiseaux se sont déplacées vers le nord et ceux-ci auraient dû se déplacer pour retrouver des conditions climatiques qui leurs sont favorables. Mais, ces animaux ont accumulé respectivement un retard de près de 135 km et 212 km par rapport aux températures ([2]Communiqué de presse du CNRS n°2407).

Ainsi, les modifications brutales des conditions climatiques associées à la réactivité trop faible des espèces pourraient causer la disparition de celles qui n'auront pas réussi à se déplacer suffisamment vite pour rester dans leur « zone de confort » climatique.

Cette modification des aires de répartition des espèces pose particulièrement problème pour les espèces vivants aux latitudes extrêmes ou en haute altitude qui, ne pouvant s'installer plus au nord ou plus haut, ne peuvent pas fuir la hausse des températures. Actuellement, le lagopède des neiges dans les Alpes ou les Pyrénées se réfugie dans les zones les plus froides, donc les plus élevées, et s'isole progressivement. Le morcellement des colonies pourrait entraîner une baisse de la diversité génétique des individus et par conséquent, un affaiblissement des populations ([4] site internet du Parc National des Ecrins).

De plus, étant donnée que toutes les espèces ne se déplacent pas à la même vitesse, les équilibres créés entre les différentes espèces cohabitant dans un même milieu vont se trouver bouleversés.

  • Conséquences du changement climatique sur l'équilibre au sein des écosystèmes
Le climat affecte directement le rythme de floraison des végétaux. Par conséquent, la distribution des espèces florales dont les insectes disposent pour se nourrir se trouve modifiée. Dans le cas des abeilles, la colonie adapte son développement sur celui du végétal. En déplaçant l'équilibre entre l'abeille et son environnement végétal, le changement climatique compromet le bon développement de la colonie.
D'autre part, chez les animaux, une reproduction trop tardive par rapport au pic d’abondance de nourriture, pourrait compromettre la croissance et la survie des jeunes.


Les invasions

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En créant de nouvelles conditions, le changement climatique conduit à la disparition d'espèces qui ne sont plus en mesures de survivre dans des zones où les conditions climatiques ont évolué. Au contraire, d'autres espèces d'insectes, d'animaux, de plantes, profitent de ces changements et de l'instabilité du milieu naturel pour s’implanter ou se développer.

Ces espèces dites "exotiques" ou exogènes sont souvent, en l’absence de leurs ennemis naturels, plus compétitives que les espèces indigènes. Ainsi, elles se développent mieux ou plus vite, au détriment des espèces autochtones. Lorsqu'elles deviennent exclusives sur un territoire ou dans un écosystème, elles sont alors appelées espèces "exotiques envahissantes" ou "invasives". Sur 100 espèce introduites, 10 s'échappent et survivent, et une seule devient invasive (cf figure ci-dessus, [9]). La prolifération de ces espèces peut constituer un véritable problème par les nuisances qu'elles causent sur l'équilibre des écosystèmes, sur la biodiversité (eutrophisation des milieux, disparitions d'espèces, etc), sur le milieu physique et sur la santé. Les principaux facteurs influant sur la croissance des plantes envahissantes sont la température, la luminosité, l'apport important en nutriments, l'artificialisation du milieu et le faible niveau d'eau. Étant donné que la température et l'intensité lumineuse sont des facteurs favorisant la croissance des plantes envahissantes, le changement climatique en cours et à venir aura certainement des effets sur le développement de ces espèces. La trame verte et bleue, mesure issue du Grenelle de l'environnement [site du Ministère du développement durable] est un outil visant à restaurer les liens physiques entre les habitats fragmentés par les activités humaines dans le but de contribuer à stopper le déclin de la biodiversité. Une certaine vigilance est requise lors de la mise en place de ces trames car elles peuvent aussi favoriser la dispersion et la colonisation de nouveaux milieux par les espèces animales et végétales envahissantes.

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Exemples d'espèces envahissantes

  • Quelques espèces végétales exotiques envahissantes [5]
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  • Exemple d'espèce animale envahissante
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Le frelon Asiatique (Vespa Velutina) a été introduit accidentellement dans le Sud-Ouest de la France en 2004. Cette espèce s'est parfaitement installée et acclimatée aux conditions climatiques de cette région comparable à celles de l'Asie continentale. Elle colonise les zones urbaines, péri-urbaines, agricoles et forestières. Sa dispersion atteignait en 2009 24 départements ([6] BE32-art3_cle4ac651.pdf Bulletin épidémiologique de l'ANSES). Avec le changement climatique, l'aire de répartition pourrait être modifiée, s'étendre encore un peu plus au nord et coloniser de nouvelles régions.


V. velutina est un véritable problème car il s'agit d'un des frelons parmi les mieux adaptés pour attraper les abeilles domestiques en vol, ce qui ralentit considérablement le développement des colonies. De plus, parce qu'il attaque en masse les individus s'approchant trop près de leur nid, le frelon asiatique pourrait représenter un risque pour la santé publique.
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Risques pour la santé publique

Le changement climatique, et plus précisément l'augmentation des températures, n'est pas sans conséquence sur la santé des personnes. En effet, les températures caniculaires contribuent directement à la mortalité par maladies cardiovasculaires ou respiratoires, en particulier chez les personnes âgées ou vulnérables. Lors de la canicule de l’été 2003 en Europe, on a ainsi enregistré plus de 70 000 décès supplémentaires.

Avec le fort engouement que suscite le retour de la nature en ville, l'introduction volontaire ou non de certaines espèces animales et végétales pourrait causer de véritables problèmes de santé publique : apparition du frelon asiatique dans nos zones urbaines, introduction de plantes à pollens allergisants... De plus, un réchauffement du climat amènerait des déplacements vers le Nord de nombreuses espèces végétales dont certaines très allergisantes. Par exemple, la répartition géographique du cyprès, arbre représentatif de la flore méditerranéenne, pourrait rapidement s'étendre jusqu'en Bourgogne ou en Touraine.

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Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, l’assainissement des zones humides, les progrès dans l’hygiène et les changements de pratiques agricoles ont fortement limité les contacts entre les moustiques et les hommes. Le regain d’intérêt provoqué par le retour de l'eau en ville risquerait de favoriser la prolifération de moustiques et donc des maladies vectorielles portées par ces insectes. Avec le changement climatique, il serait possible de voir apparaître en Europe des maladies infectieuses tropicales encore jamais vu dans nos latitudes. C'est déjà le cas de la maladie du chikungunya, maladie infectieuse tropicale transmise par certains moustiques, qui est apparue pour la première fois en France métropolitaine le 25 septembre 2010 à Fréjus dans le Var [7].

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Sources

  • [1] Rapport « La diversité biologique et les changements climatiques », Journée internationale de la diversité biologique, Convention sur la diversité biologique.
  • [2] Communiqué de presse du CNRS n°2407 (9 janvier 2012).
  • [3] Technicité n°209 (8 mai 2011) Gestion Sanitaire des espaces verts : l'envers du décor.
  • [4] Zoom sur le Lagopède alpin, site internet du parc national des Écrins.
  • [5] Fiches sur les plantes envahissantes, site internet de la Commission suisse pour la conservation des plantes sauvages.
  • [6] Bulletin épidémiologique n°32 de l'ANSES, M.P. Chauza et S. Martin : "Une nouvelle menace pour les abeilles : l’introduction du frelon asiatique Vespa velutina en France".
  • [7] Le chikungunya en France métropolitaine. Marjorie H. 2010-2011.
  • [8] Nature Publishing Group.
  • [9] Williamson, M., Ed (1996) Biological invasions, London, Chapman & Hall. 244p.


Pour aller plus loin

  • Site internet pollens.fr
  • Site internet changement climatique
  • Site internet le Réseau Biodiversité pour les Abeilles
  • Site internet l'abeille, sentinelle de l'environnement
  • Site internet du Réseau National de Surveillance Aerobiologique (RNSA)



Le créateur de cet article est Charlotte Mucig
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Auteur: Karine Rondeau - CETE de l'Est – Laboratoire Régional des Ponts et Chaussées de Nancy

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