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Souille expérimentale CNEXO d'extraction de granulats dans l'estuaire de la Seine

De Wikibardig
Site internet du RFRC : Réseau Français de Recherche Côtière

Sommaire

Introduction

A partir des années 60s, les besoins en sables et graviers a augmenté rapidement et plusieurs études furent menées par le CNEXO (ex Ifremer) pour la recherche de matériaux de substitution en mer. Afin d'étudier la réponse environnementale de l'exploitation de matériaux sous-marins, une expérience grandeur nature fut lancée en 1973 sur un site situé à l'intérieur de l'estuaire de la Seine. Le comportement morphodynamique de la souille CNEXO a été étudié durant le projet Européen SANDPIT du 5ème PCRD.

Etat initial de la bathymétrie

La souille CNEXO est longue de 2.5 km, large de 400 m et de direction SO-NE. Elle a été creusée dans une région où la profondeur varie entre 16 m et 17,5 m avec une légère pente vers le Nord. La Figure 1 donne une indication de la situation de la souille CNEXO à l'intérieur de l'estuaire de la Seine. Elle présente aussi la position de la bouée de houle du réseau Candhis qui a été utilisée pour collecter les données de houle ainsi que la position des dépôts de sédiments (dépôt d'Octeville et du Kannick).

Figure 1: Position de la souille CNEXO

Une étude sédimentaire de la partie orientale de la Baie de Seine (1967) montre que la souille CNEXO a été draguée sur un fond composé principalement de sable fin avec un diamètre médian entre 0,25 mm et 0,50 mm et une fraction de vase estimée à 2 %.

Avant le dragage, le site étudié était situé sur une vaste zone sableuse homogène sous laquelle se trouvaient d'anciennes terrasses de la Seine composées de matériaux plus grossiers qui intéressent particulièrement les exploitants.

Le dragage de la souille CNEXO se déroula de 1974 à 1980 sous forme de 13 campagnes d'extraction de granulats qui retirèrent au total plus de 2.800.000 m3 de matériaux.

Figure 2: Dragages de la souille CNEXO

L'ensemble du domaine ne fut pas exploité en même temps. De 1974 à 1977, seulement la partie Nord-Est fut draguée sur une longueur de 1500 m approximativement. A la fin de cette première étape, cet "ancien" dragage était large de 200 m et de profondeur variant entre 3 et 5 m.

De 1977 à 1980, la partie Sud-Ouest du domaine fut à son tour draguée et ce dragage fut plus profond et plus étroit. A l'issue de cette seconde étape, le dragage de 1980 est d'environ 3 km de long et d'une largeur variant entre 130 m et 300 m (dimensions mesurées en utilisant l'isobathe 18 m). La bathymétrie est plus profonde dans la partie "neuve" Sud-Ouest (profondeur entre 5 et 13 m) que dans la partie "ancienne" Nord-Est (profondeur entre 3 et 6 m).

La Figure 2 présente les différentes étapes du dragage de la souille CNEXO entre 1974 et 1980.

Données bathymétriques

Figure 3: Bathymétrie de 1981 avec la position des différentes sections

Trois différentes bathymétries ont été collectées en 1981, 1996 et 2002. Les bathymétries les plus récentes(1996 et 2002) furent réalisées par le Port du Havre qui utilisa le même "Global Positioning System" pour les deux mesures. La précision est estimée à 1 m pour les coordonnées planimétriques et de 20 cm pour la mesure altimétrique. La bathymétrie de 1981 est moins précise et les données ont été extraites par digitalisation d'une ancienne carte. Même si les mesures sont correctes, la précision est estimée à 10-15 m pour les coordonnées planimétriques et de 30 cm pour la mesure altimétrique.

Evolution Morphodynamique de la souille CNEXO depuis 1981

Analyse des sections transversales et longitudinales

Figure 4: Section Slong en 1981, 1996 et 2002

Un fort remplissage de la souille est mesuré dans la partie Sud de la souille CNEXO entre 1981 et 1996. Un remplissage plus lent est noté entre 1996 et 2002 (Voir Figure 4).


Carte bathymétrique différentielle

Une carte bathymétrique différentielle est présentée sur la Figure 5. Un remplissage clair de la souille est mesuré entre 1981 et 2002. Les deux pentes de la souille sont érodées. Le phénomène est plus fort dans la partie Sud que dans la partie Nord qui avait été moins creusée.

Figure 5: Carte bathymétrique différentielle entre 1981 et 2002.

Analyse volumique

Une analyse volumique autour du domaine de la souille apporte les conclusions suivantes. De 1981 à 1996, une accretion de +615.000 m3 (41 000 m3 /an) est relevée et, de 1996 à 2002, l'accretion est estimée à +90.000 m3 (15 000 m3 /an).

Houle et courants

Données de houle

Figure 6: Climat simplifié de houle

Deux bases de données de houles ont été collectées à partir de deux bouées du réseau Candhis positionées près de la souille CNEXO.

La première bouée est positionnée près d'Antifer et fournit des données de houle omnidirectionnelles de Juillet 1996 à Décembre 2002 avec plus de 14000 mesures de (Hp; Tp). Cette bouée étant un peu éloignée du site d'étude aurait demandé un calcul de propagation de houle pour obtenir le champ de houle modifié au-dessus de la souille étudiée.

La seconde bouée donne également des données omnidirectionnelles de Janvier 1997 à Février 2003 avec plus de 29000 measures de (Hp; Tp). Cette seconde bouée est très proche de la souille CNEXO (quelques kilomètres seulement) comme montré sur la carte de la Figure 1. Un modèle de propagation n'est pas nécessaire pour obtenir le champ de houle au-dessus de la souille CNEXO. Malheureusement, l'information sur la direction de houle n'est pas accessible.


Des données Hindcast de houle à la position ont donc été extraites de l'Atlas numérique de houle, projet conjoint Météo-France, CETMEF et EDF LNHE. Cette extraction fut réalisée pour les années 1999 et 2000 avec une donnée toutes les 3 heures, ce qui donne 5800 mesures de (Hp; Tp; Direction).


L'analyse des données numériques donne quatre domaines angulaires dominants centrés autour de quatre directions principales.

Ces domaines ont été utilisés pour définir un climat de houle simplifié (voir Figure 6). La direction dominante est autour de 298°.


Modélisation de la houle

Figure 7: Hauteur de houle au-dessus de la souille CNEXO

Le domaine de calcul étant grand, seulement les périodes de houle supérieures à 6.5 s purent être calculées avec le modèle REFONDE® qui résout l'équation de pente douce avec la méthode des éléments finis. Le maillage dépasse 800.000 éléments finis. La Figure 7 montre les résultats de modélisation pour la classe de houle H4 (Hp=3,29 m; T=7,5s; direction=298°)et et en particulier les légères modifications de la hauteur de houle derrière la souille.


Modélisation des courants

Les données de marée proviennent du modèle hydrodynamique de SOGREAH de l'estuaire de la Seine. Ces résultats sont donnés du 1er Avril 2002 au 30 Avril 2002. Cette période comprend 56 marées. Les données pour une marée moyenne sont retrouvées. Les composantes hydrodynamiques horizontales de vitesse (u,v) et la cote de la surface libre h sont données aux quatres coins du domaine rectangulaire entourant la souille CNEXO. Le domaine rectangulaire de 10 km de côté est centré sur la souille CNEXO de 3 km de longueur. La hauteur maximum de la surface libre est de 8,25 mètres et la vitesse maximum du courant de 0,77 m/s.

Figure 8: Vitesse du courant pour une marée moyenne


Une modélisation courantologique est réalisée à l'aide du modèle REFLUX® qui résout l'équation de Saint-Venant par la Méthode des Eléments Finis. Les conditions aux limites sont données par le niveau d'eau. Les vitesses du courant obtenues à l'intérieur du domaine de calcul sont comparées avec les données de SOGREAH au même point. Les résultats sont présentés sur la Figure 8. Cependant comme le courant a finalement une influence faible sur le transport sédimentaire, il fut décidé de prendre un courant instationnaire mais homogène sur l'ensemble du domaine.

Modélisation de la réponse morphologique

La modélisation morphodynamique montre que la houle a beaucoup plus d'effet que le courant sur le transport sédimentaire. Cela confirme que la simplification du champ de courant (homogène sur le domaine) est une hypothèse correcte en première approche. Nous trouvons aussi que les classes de tempête (classes H3 + H4) qui représentent seulement 4.5% de l'ensemble des évènements de houle sont responsables 90% du transport sédimentaire. Il faut décidé de modéliser d'abord seulement ces houles de tempête pour le calage du modèle et de réaliser ensuite une modélisation complète pour produire les résultats définitifs.


Figure 9: Résultats pour la section S8 avec la loi de transport sédimentaire de Soulsby –Van Rijn


Après calage, nous avons modélisé les 21 années avec l'ensemble des données de houle et un champ de courant homogène. Nous retrouvons que la "nouvelle" partie de la souille est plus remplie (environ 6 m de dépôt) que l'"ancienne" partie (environ 2 m de dépôt). Les pentes Sud de la souille sont beaucoup érodées.

La Figure 9 montre que le modèle ne reproduit pas parfaitement les mesures dans la section transversale avec une érosion trop forte des pentes Sud. La Figure 10 présente au contraire de bons résultats sur la section longitudinale excepté un remplissage trop important de la partie ancienne.

Figure 9: Résultats pour la section Slong avec la loi de transport sédimentaire de Soulsby –Van Rijn


Nous voyons aussi sur la dernière figure que le résultat avec l'ensemble des classes de houle est très proche du résultat où l'on garde que les houles de tempête. Les résultats sont cependant légèrement améliorés.

Références

Lemoine M., Clabaut P., Simon S., Augris C., 1999, Étude de la souille expérimentale d’exploitation de granulats marins dite « souille CNEXO » en baie de Seine : évolution morpho-sédimentologique et faunistique entre 1981 et 1996, Rapport Ifremer.

Desprez M., 1996, Étude des sédiments superficiels et de la macrofaune benthique dans le secteur de l’ancienne fouille expérimentale du CNEXO. État en décembre 1995. Rapport GEMEL Picardie.



Le créateur de cet article est Philippe Sergent
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