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Contrainte critique d’entrainement (HU)

De Wikibardig

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Traduction anglaise : Critical tractive stress

Dernière mise à jour : 05/03/2024

Contrainte de cisaillement critique, généralement notée $ τ_* $, à partir de laquelle une particule solide posée au fond est mise en mouvement par un fluide ; on parle également de seuil de cisaillement.

Sommaire

Approche mécaniste

Considérons des particules au repos sur le fond d’un écoulement d’eau claire.

Les différentes forces agissant sur une de ces particules (figure 1) sont :

  • son poids,
  • la poussée d’Archimède,
  • la force de traînée (due à la vitesse de l’écoulement et intégrant les frottements de peau et les effets du sillage autour de la particule),
  • la force de portance (due à la variation de la vitesse de l’écoulement entre le bas et le haut de la particule et à la forme de la particule),
  • la réaction des particules avoisinantes.


Figure 1 : Équilibre des forces s'exerçant sur une particule solide posée sur le fond d'un canal soumis à un écoulement ; Source Dufrene et Isenmann (2018).

On a coutume de regrouper le poids et la poussée d’Archimède (qui s’appliquent au même point et qui sont de sens opposé) sous le terme de « poids déjaugé ».

La mise en équation de ces différentes forces ou encore celle de leurs moments (pour tenir compte des différents modes de transport) serait nécessaire pour déterminer si la particule reste au repos ou bien au contraire si l’équilibre est rompu. En pratique, une telle mise en équation n’est possible que dans des cas simplifiés. Dans le cadre d’une approche plus pratique, on préférera passer par une analyse dimensionnelle pour établir des règles opérationnelles plus faciles à généraliser.

Analyse dimensionnelle

Variables à prendre en compte

Les variables influençant l’éventuelle mise en mouvement de la particule de la figure précédente sont :

  • Les caractéristiques des particules,
  • Les caractéristiques du fluide porteur,
  • Les caractéristiques de l’hydrodynamique,
  • Les constantes physiques.

Concernant les caractéristiques des particules, les principales variables d’influence sont la masse volumique $ ρ_s $ et la taille $ d $ (en supposant qu’il existe une taille représentative et en laissant de côté l’influence de la forme).

Nota : L’arrangement des particules, c’est-à-dire la position des particules au repos les unes par rapport aux autres, ainsi que la consolidation des sédiments sont aussi des facteurs d’influence importants, mais très difficiles à prendre en compte

Concernant les caractéristiques du fluide porteur, les variables d’influence sont sa masse volumique $ ρ $ et sa viscosité $ μ $.

Concernant l’hydrodynamique, s’il est naturel de considérer une vitesse, on laissera de côté la vitesse moyenne $ V $ car celle-ci ne constitue qu’une valeur moyenne sur la section mouillée. On lui préfèrera la vitesse de frottement ($ u_∗ $), grandeur directement liée à la contrainte de cisaillement ($ τ_w $) au fond (relation (1)). Le choix de cette grandeur, homogène à une vitesse, se justifie à partir de considérations sur le profil de vitesse à proximité du fond. Elle est en effet plus représentative de la vitesse près du fond.


$ u_* = \sqrt\frac{τ_w}{ρ}\qquad(1) $


avec :

  • $ τ_w $ : contrainte de cisaillement près du fond ou des parois (N/m2) ;
  • $ ρ $ : masse volumique du fluide (kg/m3).

Dans le cas d’un écoulement graduellement varié dans un cours d’eau ou une conduite, la contrainte de cisaillement près du fond ou des parois peut être évaluée par la relation (2) :


$ τ_w = ρ.g.R_h.J\qquad (2) $


Avec :

  • $ ρ $ : masse volumique du fluide (kg/m3),
  • $ g $ : accélération gravitationnelle (m/s2),
  • $ R_h $ : rayon hydraulique ($ R_h = \frac{S}{P} $) (m),
  • $ S $ : section mouillée (m2),
  • $ P $ : Périmètre mouillé (m),
  • $ J $ : Pente de la ligne d'énergie (ou pertes de charge par unité de longueur) (m/m).

Nota : Dans le cas d'un écoulement uniforme, la relation (2) se simplifie car $ J $ et égale à la pente du fond $ I $.

Dans le choix des variables caractérisant l’hydrodynamique, on pourra donc indifféremment considérer la vitesse de frottement $ u_* $ ou bien la contrainte de cisaillement au fond $ τ_w $.

Enfin, l’accélération gravitationnelle $ g $ intervient parmi les constantes physiques.

Choix des variables adimensionnelles

Au final, en analysant les dimensions de ces différentes variables, on peut montrer que la mise en mouvement peut être réduite à trois variables adimensionnelles. Les trois nombres sans dimensions généralement retenus sont explicités ci-après.

Rappel des variables utilisées

La liste des variables utilisées pour définir les trois nombres sans dimension est la suivante :

  • $ τ_w $ : contrainte de cisaillement près du fond ou des parois (N/m2),
  • $ d $ : dimension caractéristique des particules (m),
  • $ ρ $ : masse volumique du fluide (kg/m3),
  • $ ρ_s $ : masse volumique des particules (kg/m3),
  • $ g $ : accélération gravitationnelle (m/s2),
  • $ u_* $ : vitesse de frottement (m/s),
  • $ μ $ : viscosité dynamique (kg/m/s).

Le rapport des masses volumiques

$ ρ* = \frac{ρ_s-ρ}{ρ}\qquad (3) $


Le rapport des masses volumiques caractérise la masse volumique du matériau par rapport à la masse volumique du fluide. La différence $ ρ_s-ρ $ est privilégiée par rapport à $ ρ_s $ seul car c’est de cette façon que les masses volumiques interviennent dans l’expression du poids déjaugé.

Le nombre de Shields

$ θ = \frac{ρ.u_*^2}{(ρ_s-ρ).g.d}= \frac{τ_w}{(ρ_s-ρ).g.d}\qquad (4) $


Également appelé contrainte adimensionnelle de cisaillement ou contrainte de Shields, le nombre de Shields caractérise la contrainte de cisaillement moyenne adimensionnalisée par les caractéristiques des particules.

Le nombre de Reynolds particulaire

$ Re_* = \frac{ρ.u_*d}{μ}= \frac{ρ^{1/2}.τ_w^{1/2}.d}{μ}\qquad (5) $


Le nombre de Reynolds particulaire, qui fait intervenir la vitesse de frottement comme vitesse caractéristique et la taille de la particule comme longueur caractéristique, caractérise la turbulence au niveau de la particule.

Limites des approches utilisables

Comme indiqué précédemment, la plupart des forces qui conditionnent le transport solide sont dépendantes de la forme des particules, le plus souvent très irrégulière et variée, de leur dimensions et de leurs masses volumiques également diverses.

De plus les particules interagissent entre elles, parfois de façon complexe (par exemple en consolidant leurs dépôt). Enfin, elles modifient en permanence les caractéristiques de l'écoulement à leur voisinage.

Pour faire les calculs il est alors nécessaire d'idéaliser la forme de ces particules (par exemple en les représentant comme des parallélépipèdes ou des sphères) de taille régulière et à négliger les interactions entre les particules d'une part, entre les particules et l'écoulement du fluide d'autre part.

Du fait des limites pratiques de le formulation théorique, on utilise donc le plus souvent des modèles empiriques, fondés sur l'analyse dimensionnelle présentée plus haut, le plus connu étant le critère de Shields.

Pour en savoir plus :

Voir aussi : Diagramme de Shields (HU).

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